« Chemin de Croix » du Vendredi Saint 2006
Voici le « Chemin de Croix au Colisée du Vendredi Saint 2006 » de Notre Seigneur Jésus-Christ avec des Méditations et des Prières de son excellence Mgr Angelo Comastri (1943-….), Vicaire Général pour la Cité du Vatican et Archiprêtre de la Basilique Saint-Pierre entre 2005 et 2021.
Le « Chemin de Croix au Colisée du Vendredi Saint 2006 » :
Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. Ainsi soit-il.
PREMIÈRE STATION : Jésus est condamné à mort
V/. Adoramus te, Christe, et benedicimus tibi.
R/. Quia per sanctam crucem tuam redemisti mundum.
De l'Évangile selon Saint Matthieu 27, 22-23.26
Pilate leur dit : « Que ferai-je donc de Jésus, celui qu'on appelle le Messie ? » Ils répondirent tous : « Qu'on le crucifie ! » Il poursuivit : « Quel mal a-t-il donc fait ? » Ils criaient encore plus fort : « Qu'on le crucifie ! » Il leur relâcha donc Barabbas ; quant à Jésus, il le fit flageller et le leur livra pour qu'il soit crucifié.
MÉDITATION :
Nous connaissons bien cette scène de condamnation : ce sont les nouvelles de chaque jour ! Pourtant une question nous brûle le cœur : pourquoi est-il possible de condamner Dieu ? Parce que Dieu, qui est Tout-puissant, se présente sous les habits de la faiblesse ? Parce que Dieu se laisse agresser par l'orgueil et par l'insolence et par l'arrogance humaine ? Parce que Dieu se tait ? Le silence de Dieu est notre tourment, il est notre épreuve ! Mais il est aussi la purification de notre précipitation, il est la guérison de notre désir de vengeance. Le silence de Dieu est la terre où meurt notre orgueil et où s'épanouit la vraie foi, la foi humble, la foi qui ne pose pas de questions à Dieu, mais qui s'en remet à lui avec la confiance d'un enfant.
PRIÈRE :
Seigneur, comme il est facile de condamner ! Comme il est facile de jeter des pierres : les pierres du jugement et de la calomnie, les pierres de l'indifférence et de l'abandon ! Seigneur, Tu as choisi de te tenir du côté des vaincus, du côté des humiliés et des condamnés (Mt 25, 31-46). Aide-nous à ne jamais devenir les bourreaux de nos frères sans défense ; aide-nous à prendre courageusement position pour défendre les faibles, aide-nous à refuser l'eau de Pilate parce qu'elle ne lave pas les mains mais parce qu'elle les souille de sang innocent.
PATER NOSTER
Stabat mater dolorosa iuxta crucem lacrimosa, dum pendebat Filius.
Debout, la Mère douloureuse près de la Croix était en larmes devant son Fils suspendu.
DEUXIÈME STATION : Jésus est chargé de la Croix
V/. Adoramus te, Christe, et benedicimus tibi.
R/. Quia per sanctam crucem tuam redemisti mundum.
De l’Évangile selon Saint Matthieu 27, 27-31
Alors les soldats du gouverneur emmenèrent Jésus dans le prétoire et rassemblèrent autour de lui toute la garde. Ils lui enlevèrent ses vêtements et le couvrirent d'un manteau rouge. Puis, avec des épines, ils tressèrent une couronne, et la posèrent sur sa tête; ils lui mirent un roseau dans la main droite et, pour se moquer de lui, ils s'agenouillaient en lui disant : « Salut, roi des Juifs ! » Et, crachant sur lui, ils prirent le roseau et ils le frappaient à la tête. Quand ils se furent bien moqués de lui, ils lui enlevèrent le manteau, lui remirent ses vêtements, et l'emmenèrent pour le crucifier.
MÉDITATION :
Dans la passion du Christ, la haine s'est déchaînée, notre haine, la haine de l'humanité tout entière (Lc 22, 53). Dans la passion du Christ, notre méchanceté s'est élevée contre la bonté, notre orgueil s'est rageusement enflammé contre l'humilité, notre corruption s'est insurgée contre la resplendissante transparence de Dieu ! Et ainsi ... nous sommes devenus la croix de Dieu ! Nous, stupidement rebelles, nous, par nos absurdes péchés, nous avons élevé la croix de notre inquiétude et de notre malheur : nous avons érigé notre punition. Mais Dieu prend la croix sur ses épaules, notre croix, et il nous défie par la puissance de son amour. Dieu prend la croix ! Mystère insondable de bonté ! Mystère d'humilité qui nous fait avoir honte d'être encore orgueilleux !
PRIÈRE :
Seigneur Jésus, Tu es entré dans l'histoire humaine et tu l'as trouvée hostile à Toi (Gv 1, 10-11), rebelle à Dieu, folie de cet orgueil qui fait croire à l'homme qu'il est de grande stature... comme son ombre ! Seigneur Jésus, Tu ne nous as pas agressés mais tu t'es laissé agresser par nous, par moi, par chacun ! Soigne-moi, Jésus, par ta patience, guéris-moi par ton humilité, redonne-moi ma véritable stature de créature : ma stature de petit .... Infiniment aimé par Toi !
PATER NOSTER
Cuius animam gementem, contristatam et dolentem pertransivit gladius.
Dans son âme qui gémissait, toute brisée, endolorie, le glaive était enfoncé.
TROISIÈME STATION : Jésus tombe pour la première fois
V/. Adoramus te, Christe, et benedicimus tibi.
R/. Quia per sanctam crucem tuam redemisti mundum.
Du livre du prophète Isaïe 53, 4-6
Pourtant, c'étaient nos souffrances qu'il portait, nos douleurs dont il était chargé. Et nous, nous pensions qu'il était châtié, frappé par Dieu, humilié. Or, c'est à cause de nos fautes qu'il a été transpercé, c'est par nos péchés qu'il a été broyé. Le châtiment qui nous obtient la paix est tombé sur lui, et c'est par ses blessures que nous sommes guéris. Nous étions tous errants comme des brebis, chacun suivait son propre chemin. Mais le Seigneur a fait retomber sur lui nos fautes à nous tous.
MÉDITATION :
Dans l'idée des hommes, Dieu ne peut pas tomber et pourtant il tombe. Pourquoi ? Cela ne peut pas être un signe de faiblesse, mais seulement un signe d'amour : un message d'amour pour nous. En tombant sous le poids de la croix, Jésus nous rappelle que le péché est lourd, que le péché abaisse et détruit, que le péché punit et fait mal : c'est pourquoi le péché est mal ! (Jr 2, 5.19; 5, 25) Mais Dieu nous aime et il veut notre bien ; et l'amour le pousse à crier à ceux qui sont sourds, à nous qui ne voulons pas entendre : Fuyez le péché, parce qu'il vous fait mal. Il vous enlève la paix et la joie ; il vous éloigne de la vie et il assèche en vous la source de la liberté et de la dignité. Fuyez ! Fuyez !
PRIÈRE :
Seigneur, nous avons perdu le sens du péché ! Aujourd'hui est en train de se répandre, par une propagande sournoise, une folle apologie du mal, un absurde culte de Satan, une folle volonté de transgression, une fausse et inconsistante liberté qui exaltent le caprice, le vice et l'égoïsme, les présentant comme des conquêtes de la civilisation. Seigneur Jésus, ouvre nos yeux : fais que nous voyions la boue et que nous la reconnaissions pour ce qu'elle est, afin qu'une larme de repentir restaure en nous la pureté et l'espace d'une vraie liberté. Ouvre nos yeux, Seigneur Jésus !
PATER NOSTER
O quam tristis et afflicta fuit illa benedicta mater Unigeniti !
Qu'elle était triste et affligée, la Mère entre toutes bénie, la Mère du Fils unique !
QUATRIÈME STATION : Jésus rencontre sa Mère
V/. Adoramus te, Christe, et benedicimus tibi.
R/. Quia per sanctam crucem tuam redemisti mundum.
De l’Évangile selon Saint Luc 2, 34-35.51
Syméon les bénit, puis il dit à Marie sa mère : « Vois, ton fils qui est là provoquera la chute et le relèvement de beaucoup en Israël. Il sera un signe de division. Et toi-même, ton cœur sera transpercé par une épée ». Il descendit avec eux pour rentrer à Nazareth et il leur était soumis. Sa mère gardait dans son cœur tous ces événements.
MÉDITATION :
Toute mère est visage de l'amour, refuge de tendresse, fidélité qui n'abandonne pas, parce qu'une vraie mère aime même quand elle n'est pas aimée. Marie est Mère ! En elle, la féminité ne connaît pas d'ombre, en elle, l'amour n'est pas corrompu par des relents d'égoïsme qui emprisonnent le cœur et qui le paralysent. Marie est Mère ! Son cœur est fidèlement attaché au cœur de son Fils, et il souffre et porte la croix et il éprouve dans sa propre chair toutes les blessures de la chair de son Fils. Marie est Mère ! Et elle continue d'être Mère : pour nous, pour toujours !
PRIÈRE :
Seigneur Jésus, nous avons tous besoin de cette Mère ! Nous avons besoin d'un amour qui soit vrai et fidèle. Nous avons besoin d'un amour qui ne vacille jamais, un amour qui soit un refuge assuré pour le temps de la peur, de la souffrance et de l'épreuve. Seigneur Jésus, nous avons besoin de femmes, d'épouses, de mères, qui redonnent aux hommes le beau visage de l'humanité. Seigneur Jésus, nous avons besoin de Marie : la femme, l'épouse, la mère, qui jamais ne déforme ni ne renie l'amour ! Seigneur Jésus, nous te prions pour toutes les femmes du monde !
PATER NOSTER
Quæ mærebat et dolebat, pia mater, cum videbat Nati pœnas incliti.
Qu'elle avait mal, qu'elle souffrait La tendre Mère, en contemplant son divin Fils tourmenté !
CINQUIÈME STATION : Simon de Cyrène aide Jésus à porter la Croix
V/. Adoramus te, Christe, et benedicimus tibi.
R/. Quia per sanctam crucem tuam redemisti mundum.
De l’Évangile selon Saint Matthieu 27, 32 ; 16, 24
En sortant, ils trouvèrent un nommé Simon, originaire de Cyrène, et ils le réquisitionnèrent pour porter la croix. Jésus dit à ses disciples : « Celui qui veut marcher à ma suite, qu'il renonce à lui-même, qu'il prenne sa croix chaque jour, et qu'il me suive ».
MÉDITATION :
Simon de Cyrène, tu es un petit, un pauvre, un paysan inconnu dont les livres d'histoire ne parlent pas. Et pourtant tu fais l'histoire ! Tu as écrit un des plus beaux chapitres de l'histoire de l'humanité : tu portes la croix d'un Autre, tu soulèves le bois de souffrance et tu empêches qu'il n'écrase la victime. À chacun de nous, tu rends sa dignité, nous rappelant que nous ne sommes nous-mêmes que si nous ne pensons pas à nous-mêmes (Lc 9, 24). Tu nous rappelles que le Christ nous attend dans nos rues, sur nos paliers, à l'hôpital, en prison ... Dans les banlieues de nos villes. Le Christ nous attend ! (Mt 25, 40) Saurons-nous le reconnaître ? Lui viendrons-nous en aide ? Ou mourrons-nous dans notre égoïsme ?
PRIÈRE :
Seigneur Jésus, l'amour est en train de s'éteindre et le monde devient froid, inhospitalier, invivable. Brise les chaînes qui nous empêchent d'aller à la rencontre des autres. Aide-nous à nous retrouver nous-mêmes dans l'amour. Seigneur Jésus, le bien-être est en train de nous déshumaniser, les loisirs sont devenus une aliénation, une drogue : et le lancinant message publicitaire de cette société, c'est une invitation à mourir dans l'égoïsme. Seigneur Jésus, rallume en nous l'étincelle de l'humanité que Dieu a mis dans notre cœur au début de la création. Libère-nous de la décadence de l'égoïsme et nous retrouverons aussitôt la joie de vivre et l'envie de chanter.
PATER NOSTER
Quis est homo qui non fleret, matrem Christi si videret in tanto supplicio ?
Quel est celui qui sans pleurer pourrait voir la Mère du Christ dans un supplice pareil ?
SIXIÈME STATION : Véronique essuie le visage de Jésus
V/. Adoramus te, Christe, et benedicimus tibi.
R/. Quia per sanctam crucem tuam redemisti mundum.
Du Livre du Prophète Isaïe 53, 2-3
Il n'était ni beau ni brillant pour attirer nos regards, son extérieur n'avait rien pour nous plaire. Il était méprisé, abandonné de tous, homme de douleurs, familier de la souffrance, semblable au lépreux dont on se détourne.
Du Livre des Psaumes 41 (42), 2-3
Comme un cerf altéré cherche l'eau vive, ainsi mon âme te cherche toi, mon Dieu. Mon âme a soif de Dieu, le Dieu vivant ; quand pourrai-je m'avancer, paraître face à Dieu ?
MÉDITATION :
Le visage de Jésus est trempé de sueur, sillonné de sang, et couvert de crachats insolents. Qui aura le courage de s'approcher ? Une femme ! Une femme s'avance devant tout le monde, tenant allumée la lampe de l'humanité et elle essuie le Visage : et elle retrouve le Visage ! Combien de personnes sont aujourd'hui sans visage ! Combien de personne sont rejetées aux marges de la vie, dans l'exil de l'abandon, dans l'indifférence qui tue les indifférents. En réalité seul est vivant celui qui brûle d'amour et qui se penche sur le Christ, qui souffre et qui attend en celui qui souffre : aujourd'hui ! Oui, aujourd'hui ! Parce que demain il sera trop tard ! (Mt 25, 11-13)
PRIÈRE :
Seigneur Jésus, il suffirait d'un pas et le monde pourrait changer ! Il suffirait d'un pas et la paix reviendrait en famille ; il suffirait d'un pas et le mendiant ne serait plus seul ; il suffirait d'un pas et le malade sentirait une main serrer sa main pour guérir les deux. Il suffirait d'un pas et les pauvres pourraient s'asseoir à table, chassant la tristesse de la table des égoïstes qui ne peuvent faire la fête tout seuls. Seigneur Jésus, il suffirait d'un pas ! Aide-nous à le faire, parce que toutes les ressources de la joie sont en train de s'épuiser dans le monde. Aide-nous, Seigneur !
PATER NOSTER
Quis non posset contristari Christi matrem contemplari, dolentem cum Filio ?
Qui pourrait sans souffrir comme elle contempler la Mère du Christ douloureuse avec son Fils ?
SEPTIÈME STATION : Jésus tombe pour la deuxième fois
V/. Adoramus te, Christe, et benedicimus tibi.
R/. Quia per sanctam crucem tuam redemisti mundum.
Du Livre de Jérémie 12, 1
Tu es trop juste, Seigneur, pour que j'entre en contestation avec toi. Cependant je parlerai avec toi de questions de droit : pourquoi la voie des méchants est-elle prospère ? Pourquoi tous les traîtres sont-ils en paix ?
Du Livre des Psaumes 36 (37), 1-2.10-11
Ne t'indigne pas à la vue des méchants, n'envie pas les gens malhonnêtes ; aussi vite que l'herbe, ils se fanent ; comme la verdure, ils se flétrissent. Encore un peu de temps : plus d'impie ; tu pénètres chez lui : il n'y est plus. Les doux posséderont la terre et jouiront d'une abondante paix.
MÉDITATION :
Notre arrogance, notre violence, nos injustices pèsent sur le corps du Christ. Elles pèsent ... et le Christ tombe une nouvelle fois pour nous révéler le poids insupportable de notre péché. Mais quel est donc aujourd'hui ce qui atteint tout particulièrement le saint corps du Christ ? Assurément, elle fait partie de la douloureuse passion de Dieu l'agression contre la famille. Il semble qu'aujourd'hui se manifeste une sorte d'anti-Genèse, un anti-projet, un orgueil diabolique qui pense éliminer la famille. L'homme voudrait réinventer l'humanité en bouleversant même la grammaire de la vie telle que Dieu l'a pensée et voulue (Gn 1, 27; 2, 24). Se substituer à Dieu sans être Dieu est la plus folle arrogance, c'est la plus dangereuse aventure. La chute du Christ nous ouvre les yeux et nous fait revoir le beau visage, le vrai visage, le saint visage de la famille. Le visage de la famille dont tous nous avons besoin.
PRIÈRE :
Seigneur Jésus, la famille est un rêve de Dieu confié à l'humanité ; la famille est une étincelle de Ciel partagée avec l'humanité ; la famille est le berceau où nous sommes nés et où nous renaissons continuellement dans l'amour. Seigneur Jésus, entre dans nos maisons et entonne le chant de la vie. Rallume la lampe de l'amour et fais nous goûter la beauté d'être liés les uns aux autres dans une embrassade de vie : la vie nourrie du souffle même de Dieu, le souffle du Dieu-Amour. Seigneur Jésus, sauve la famille, pour que la vie soit sauvée ! Seigneur Jésus, sauve ma famille, notre famille !
PATER NOSTER
Pro peccatis suæ gentis vidit Iesum in tormentis, et flagellis subditum.
Pour les péchés de tout son peuple elle le vit dans ses tourments, subissant les coups de fouet.
HUITIÈME STATION : Jésus rencontre les femmes de Jérusalem
V/. Adoramus te, Christe, et benedicimus tibi.
R/. Quia per sanctam crucem tuam redemisti mundum.
De l’Évangile selon Saint Luc 23,27-29.31
Le peuple, en grande foule, le suivait, ainsi que des femmes qui se frappaient la poitrine et se lamentaient sur Jésus. Il se retourna et leur dit : « Femmes de Jérusalem, ne pleurez pas sur moi ! Pleurez sur vous-mêmes et sur vos enfants! Voici venir des jours où l'on dira : « Heureuses les femmes stériles, celles qui n’ont pas enfanté, celles qui n'ont pas allaité ! Car si l'on traite ainsi l'arbre vert, que deviendra l'arbre sec ? »
MÉDITATION :
Les larmes des mères de Jérusalem inondent de pitié le chemin du Condamné, adoucissent la férocité d'une exécution capitale et nous rappellent que nous sommes tous fils : fils nés de l'étreinte d'une mère. Mais les larmes des mères de Jérusalem ne sont qu'une petite goutte du fleuve de larmes versé par les mères : mères de crucifiés, mères d'assassins, mères de drogués, mères de terroristes, mères de violeurs, mères de fous : ... mais toujours mères ! Cependant, les larmes ne suffisent pas. Les larmes doivent se transformer en amour qui éduque, en force qui guide, en sévérité qui corrige, en dialogue qui construit, en présence qui parle ! Les larmes doivent empêcher d'autres larmes !
PRIÈRE :
Seigneur Jésus, tu connais les larmes des mères, tu vois dans chaque maison le lieu de la souffrance, tu entends le gémissement silencieux de nombreuses mères blessées par leurs enfants : blessées à mort… restant vivantes ! Seigneur Jésus, dissous les caillots de dureté qui empêchent l'amour de circuler dans les artères de nos familles. Fais que, une fois encore, nous nous sentions fils pour donner à nos mères - sur la terre et au ciel - la fierté de nous avoir engendrés et la joie de pouvoir bénir le jour de notre naissance. Seigneur Jésus, essuie les larmes des mères afin que refleurisse le sourire sur le visage des enfants, sur le visage de tous.
PATER NOSTER
Tui Nati vulnerati, tam dignati pro me pati, pœnas mecum divide.
Ton enfant n'était que blessures, lui qui daigna souffrir pour moi ; donne-moi part à ses peines.
NEUVIÈME STATION : Jésus tombe pour la troisième fois
V/. Adoramus te, Christe, et benedicimus tibi.
R/. Quia per sanctam crucem tuam redemisti mundum.
Du Livre du Prophète Habacuc 1, 12-13 ; 2, 2-3
Depuis les temps anciens, n'es-tu pas le Seigneur, mon Dieu, mon Dieu Saint ? Tes yeux sont trop purs pour voir faire le mal, Tu ne peux supporter la vue de l'oppression. Alors, pourquoi regardes-tu ces perfides, pourquoi restes-tu silencieux quand le méchant engloutit l'homme juste ? Tu vas mettre par écrit la vision, bien clairement sur des tablettes, pour qu'on puisse la lire couramment. Cette vision se réalisera, mais seulement au temps fixé ; elle tend vers son accomplissement, elle ne décevra pas. Si elle paraît tarder, attends-la : elle viendra certainement à son heure.
MÉDITATION :
Pascal observait avec finesse : « Jésus sera en agonie jusqu'à la fin du monde : il ne faut pas dormir pendant ce temps-là » (B. Pascal, Pensées, Brunschvicg 553). Mais où Jésus agonise-t-il pendant ce temps ? La division du monde en zones de bien-être et en zones de misère ... c'est l'agonie du Christ aujourd'hui. Le monde est en effet composé de deux pièces : dans l'une, on gaspille, dans l'autre, on meurt ; dans l'une, on meurt d'abondance, dans l'autre, on meurt d'indigence ; dans l'une, on craint l'obésité, dans l'autre, on invoque la charité. Pourquoi ne pas ouvrir pas une porte ? Pourquoi ne pas former une seule table ? Pourquoi ne pas comprendre que les pauvres sont la thérapie des riches ? Pourquoi ? Pourquoi ? Pourquoi sommes-nous si aveugles ?
PRIÈRE :
Seigneur Jésus, l'homme qui vit pour amasser, tu l'as appelé insensé ! (Lc 12,20) Oui, est insensé celui qui pense posséder quelque chose, car un seul est le Propriétaire du monde. Seigneur Jésus, le monde est à toi, uniquement à toi. Et tu l'as donné à tous les hommes afin que la terre soit une maison qui les nourrit et les protège tous. Amasser, c'est donc voler si amasser inutilement empêche les autres de vivre. Seigneur Jésus, fais cesser le scandale qui divise le monde en villes et bidonvilles. Seigneur enseigne-nous de nouveau la fraternité !
PATER NOSTER
Eia, mater, fons amoris, me sentire vim doloris fac, ut tecum lugeam.
Daigne, ô Mère, source d'amour, me faire éprouver tes souffrances pour que je pleure avec toi.
DIXIÈME STATION : Les soldats se partagent les vêtements de Jésus
V/. Adoramus te, Christe, et benedicimus tibi.
R/. Quia per sanctam crucem tuam redemisti mundum.
De l'Évangile selon Saint Jean 19, 23-24
Quand les soldats eurent crucifié Jésus, ils prirent ses habits ; ils en firent quatre parts, une pour chacun. Restait la tunique ; c'était une tunique sans couture, tissée tout d'une pièce de haut en bas. Alors ils se dirent entre eux : « Ne la déchirons pas, tirons au sort celui qui l'aura ». Ainsi s'accomplissait la parole de l'Écriture: Ils se sont partagé mes habits ; ils ont tiré au sort mon vêtement.
MÉDITATION :
Les soldats ôtent à Jésus sa tunique avec la brutalité des voleurs et tentent de lui voler aussi sa pudeur et sa dignité. Mais Jésus est la pudeur, Jésus est la dignité de l'homme et de son corps. Et le corps humilié du Christ devient le chef d'accusation de toutes les humiliations du corps humain, créé par Dieu comme visage de l'âme et langage pour exprimer l'amour. Toutefois, aujourd'hui, le corps est souvent vendu et acheté sur les trottoirs des villes, sur les trottoirs de la télévision, dans les maisons devenues trottoirs. Quand comprendrons-nous que nous tuons l'amour ? Quand comprendrons-nous que, sans pureté, le corps ne vit pas et qu'il ne peut engendrer la vie ?
PRIÈRE :
Seigneur Jésus, autour de la pureté, un silence général a été habilement imposé : un silence impur ! On a même répandu la conviction - absolument mensongère! - que la pureté est ennemie de l'amour. C'est le contraire qui est vrai, Seigneur ! La pureté est la condition indispensable pour pouvoir aimer : pour aimer vraiment, pour aimer fidèlement. Du reste, Seigneur, si quelqu'un n'est pas maître de lui-même, comment pourra-t-il se donner lui-même ? Seul celui qui est pur, peut aimer ; Seul celui qui est pur, peut aimer sans souiller. Seigneur Jésus, par la puissance de Ton sang versé par amour, donne-nous un cœur pur afin que renaisse l'amour dans le monde, l'amour dont tous éprouvent une immense nostalgie.
PATER NOSTER
Fac ut ardeat cor meum in amando Christum Deum, ut sibi complaceam.
Fais qu'en mon cœur brûle un grand feu pour mieux aimer le Christ mon Dieu et que je puisse Lui plaire.
ONZIÈME STATION : Jésus est cloué à la Croix
V/. Adoramus te, Christe, et benedicimus tibi.
R/. Quia per sanctam crucem tuam redemisti mundum.
De l’Évangile selon Saint Matthieu 27,35-42
Après l'avoir crucifié, ils se partagèrent ses vêtements en tirant au sort ; et ils restaient là, assis, à le regarder. Au-dessus de sa tête on inscrivit le motif de sa condamnation : Celui-ci est Jésus, le roi des Juifs. En même temps, on crucifie avec lui deux bandits, l'un à droite et l'autre à gauche. Les passants l'injuriaient en hochant la tête : « Toi qui détruis le Temple et le rebâtis en trois jours, sauve-toi toi-même, si tu es Fils de Dieu, et descends de la croix ! » De même, les chefs des prêtres se moquaient de lui avec les scribes et les anciens, en disant : « Il en a sauvé d'autres, et il ne peut pas se sauver lui-même ! C'est le roi d'Israël : qu'il descende maintenant de la croix et nous croirons en lui ! »
MÉDITATION :
Ces mains qui ont béni tout le monde sont à présent clouées à la croix, ces pieds qui ont tant marché pour semer espérance et amour sont à présent fixés au gibet. Pourquoi, Seigneur ? Par amour ! (1 Jn 4, 8.16) Pourquoi la passion ? Par amour ! Pourquoi la croix ? Par amour ! Pourquoi, Seigneur, n'es-tu pas descendu de la croix pour répondre à nos provocations ? Je ne suis pas descendu de la croix car ainsi j'aurais consacré la force reine du monde, alors que l'amour est l'unique force qui peut changer le monde. Pourquoi, Seigneur, ce prix si lourd ? Pour vous dire que Dieu est Amour (Jn 13, 1 ), Amour infini, Amour Tout-Puissant. Me croirez-vous ?
PRIÈRE :
Jésus crucifié, tout le monde peut nous tromper, nous abandonner, nous décevoir : Toi seul ne nous décevras jamais ! Tu as laissé nos mains te clouer cruellement à la croix pour nous dire que ton amour est vrai, sincère, fidèle, irrévocable. Jésus crucifié, nos yeux voient tes mains clouées, capables néanmoins de donner la vraie liberté ; ils voient tes pieds immobilisés par les clous et pourtant encore capables de marcher et de faire marcher. Jésus crucifié, c'en est fini de l'illusion d'un bonheur sans Dieu. Nous revenons à toi, unique espérance et unique liberté, unique joie et unique vérité : Jésus crucifié, aie pitié de nous, pécheurs !
PATER NOSTER
Sancta mater, istud agas, Crucifixi fige plagas cordi meo valide.
Ô sainte Mère, daigne donc graver les plaies du Crucifié profondément dans mon cœur.
DOUZIÈME STATION : Jésus meurt sur la Croix
V/. Adoramus te, Christe, et benedicimus tibi.
R/. Quia per sanctam crucem tuam redemisti mundum.
De l’Évangile selon Saint Jean 19, 25-27
Or, près de la croix de Jésus se tenait sa mère, avec la sœur de sa mère, Marie femme de Cléophas, et Marie Madeleine. Jésus, voyant sa mère, et près d'elle le disciple qu'il aimait, dit à sa mère : « Femme, voici ton fils ! » Puis il dit au disciple : « Voici ta mère ! » Et à partir de cette heure-là, le disciple la prit chez lui.
De l’Évangile selon Saint Matthieu 27, 45-46.50
À partir de midi, l'obscurité se fit sur toute la terre jusqu'à trois heures. Vers trois heures, Jésus cria d'une voix forte : « Eli, Eli, lama sabactani ? », ce qui veut dire : « Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m'as-tu abandonné ? » Jésus, poussant de nouveau un grand cri, rendit l'esprit.
MÉDITATION :
De manière insensée, l'homme s'est dit : Dieu est mort ! Mais si Dieu meurt, qui nous donnera encore la vie ? Si Dieu meurt, qu'est donc la vie ? La vie est Amour ! Alors la croix n'est pas la mort de Dieu, mais le moment où se brise l'écorce fragile de l'humanité assumée par Dieu, et où jaillit le fleuve d'amour (Jn 19, 30 ) qui renouvelle l'humanité. De la croix naît la vie nouvelle de Saul, de la croix naît la conversion d'Augustin, de la croix naît la pauvreté joyeuse de François d'Assise, de la croix naît la bonté rayonnante de Vincent de Paul ; de la croix naît l'héroïsme de Maximilien Kolbe, de la croix naît la merveilleuse charité de Mère Teresa de Calcutta, de la croix naît le courage de Jean-Paul II, de la croix naît la révolution de l'amour : c'est pourquoi que la croix n'est pas la mort de Dieu, mais la naissance de son Amour dans le monde. Bénie soit la croix du Christ !
PRIÈRE :
Seigneur Jésus, dans le silence de ce soir, on entend ta voix : « J'ai soif ! » (Jn 19, 28 ) J'ai soif de ton amour ! Dans le silence de cette nuit, on entend ta prière : « Père, pardonne-leur ! Père pardonne-leur ! » (Lc 23, 34) Dans le silence de l'histoire, on entend ton cri : « Tout est accompli » (Jn 19, 30) Qu'est-ce qui est accompli ? Je vous ai tout donné, je vous ai tout dit, Je vous ai apporté la plus belle nouvelle : Dieu est amour ! Dieu vous aime ! Dans le silence du cœur, on ressent la caresse de ton ultime don : Voici ta mère (Jn 19, 27) : ma mère ! Merci Jésus, parce que tu as confié à Marie la mission de nous rappeler chaque jour que le sens de toute chose, c'est l'amour : l'Amour de Dieu planté dans le monde comme une croix ! Merci, Jésus !
PATER NOSTER
Vidit suum dulcem Natum morientem desolatum, cum emisit spiritum.
Elle vit son enfant très cher mourir dans la désolation alors qu'il rendait l'esprit.
TREIZIÈME STATION : Jésus est descendu de la Croix et confié à sa Mère
V/. Adoramus te, Christe, et benedicimus tibi.
R/. Quia per sanctam crucem tuam redemisti mundum.
De l’Évangile selon Saint Matthieu 27, 55. 57-58 ; 17, 22-23
Il y avait là plusieurs femmes qui regardaient à distance : elles avaient suivi Jésus depuis la Galilée pour le servir. Le soir venu, arriva un homme riche, originaire d'Arimathie, qui s'appelait Joseph, et qui était devenu lui aussi disciple de Jésus. Il alla trouver Pilate pour demander le corps de Jésus. Alors Pilate ordonna de le lui remettre. Comme Jésus et les disciples étaient réunis en Galilée, il leur dit : « Le Fils de l'homme va être livré aux mains des hommes ; ils le tueront et, le troisième jour, il ressuscitera ». Et ils furent profondément attristés.
MÉDITATION :
Le crime est accompli : Nous avons tué Jésus ! (Lc 1, 46-55) Et les plaies du Christ brûlent dans le cœur de Marie, tandis qu'une unique souffrance étreint la Mère et le Fils. La Mère des Douleurs ! Oui, la Mère des Douleurs crie, suscite compassion et touche aussi celui qui a l'habitude de blesser. La Mère des Douleurs ! Il semble que nous ayons de la compassion pour Dieu, et en réalité - une fois encore - c'est Dieu qui a de la compassion pour nous. La Mère des Douleurs ! La souffrance n'est plus désespérance et elle ne le sera jamais plus, parce que Dieu est venu souffrir avec nous. Et avec Dieu, peut-on désespérer ?
PRIÈRE :
Ô Marie, en ton Fils, tu embrasses tout fils, et tu ressens le déchirement de toutes les mères du monde. Ô Marie, tes larmes passent de siècle en siècle et marquent les visages et pleurent les pleurs de tous. Ô Marie, Tu connais la souffrance... pourtant tu crois ! Tu crois que les nuages n'obscurcissent pas le soleil, tu crois que la nuit prépare l'aurore. Ô Marie, Toi qui as chanté le Magnificat (Za 12, 10), entonne pour nous le chant victorieux de la souffrance comme un enfantement d'où naît la vie. Ô Marie, prie pour nous ! Prie pour que nous soyons, nous aussi, envahis par la véritable espérance.
PATER NOSTER
Fac me vere tecum flere, Crucifixo condolere, donec ego vixero.
Que vraiment je pleure avec toi, qu'avec le Christ en Croix je souffre, chacun des jours de ma vie !
QUATORZIÈME STATION : Jésus est mis au tombeau
V/. Adoramus te, Christe, et benedicimus tibi.
R/. Quia per sanctam crucem tuam redemisti mundum.
De l’Évangile selon Saint Matthieu 27, 59-61
Prenant le corps, Joseph l'enveloppa dans un linceul neuf, et le déposa dans le tombeau qu'il venait de se faire tailler dans le roc. Puis il roula une grande pierre à l'entrée du tombeau et s'en alla. Cependant Marie Madeleine et l'autre Marie étaient là, assises en face du tombeau.
Du Livre des Psaumes 16 (15), 9-11
Mon cœur exulte, mon âme est en fête, ma chair elle-même repose en confiance : tu ne peux m'abandonner à la mort ni laisser ton ami voir la corruption. Tu m'apprends le chemin de la vie : devant ta face, débordement de joie ! À ta droite, éternité de délices !
MÉDITATION :
La vie ressemble parfois à un long et triste Samedi Saint. Tout semble fini, le méchant semble triompher, le mal semble plus fort que le bien (Jr 12, 1; Ha 1, 13 ). Cependant la foi nous fait voir plus loin, elle nous fait entrevoir les lumières d'un jour nouveau au-delà de ce jour. La foi nous garantit que le dernier mot revient à Dieu : uniquement à Dieu ! La foi est vraiment une petite lampe, cependant c'est l'unique lampe qui éclaire la nuit du monde : et son humble lumière se répand avec les premières lueurs du jour : le jour du Christ Ressuscité. L'histoire ne finit donc pas au tombeau, mais resurgit au tombeau : ainsi l'a promis Jésus (Lc 18, 31-33), c'est arrivé et cela arrivera encore ! (Rm 8, 18-23)
PRIÈRE :
Seigneur Jésus, le Vendredi Saint est le jour des ténèbres, le jour de la haine sans raison, le jour de l'exécution du Juste ! Mais le Vendredi Saint n'est pas le dernier mot : le dernier mot, c'est Pâques, le triomphe de la Vie, la victoire du Bien sur le mal. Seigneur Jésus, le Samedi Saint est le jour du vide, le jour de la peur et du désarroi, le jour où tout semble fini ! Mais le Samedi Saint n'est pas le dernier jour : le dernier jour, c'est Pâques, la Lumière qui se rallume, l'Amour qui vainc toute haine. Seigneur Jésus, tandis que se consume notre Vendredi Saint et que se répète l'angoisse de nombreux Samedis Saints, donne-nous la foi tenace de Marie pour croire à la vérité de Pâques ; donne-nous son regard limpide pour discerner les lueurs qui annoncent le dernier jour de l'histoire : un ciel nouveau et une terre nouvelle (Ap 21, 1 ) déjà inaugurés en Toi, Jésus Crucifié et Ressuscité. Amen !
PATER NOSTER
Quando corpus morietur, fax ut animæ donetur paradisi gloria. Amen.
Au moment où mon corps mourra, fais qu'à mon âme soit donnée la gloire du Paradis. Amen.
Le Saint-Père s'adresse aux personnes présentes. À la fin de son discours, le Saint-Père donne la Bénédiction Apostolique :
V/. Dominus vobiscum.
R/. Et cum spiritu tuo.
V/. Sit nomen Domini benedictum.
R/. Ex hoc nunc et usque in sæculum.
V/. Adiutorium nostrum in nomine Domini.
R/. Qui fecit cælum et terram.
V/. Benedicat vos omnipotens Deus, Pater, et Filius, et Spiritus Sanctus.
R/. Amen.
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