Mon Père, pensez-vous qu'on puisse prier, même en fumant ?
Voici l’histoire des « Frères Jésuites fumeurs impénitents » et le Conseil « Prier n'importe où et n'importe quand » du Frère Dominicain Jean-Pierre Lintanf (1925- ….), Prieur du Couvent Sainte-Marie de La Tourette à Éveux près de Lyon et actuellement au Couvent de l'Annonciation de la rue du Faubourg-Saint-Honoré à Paris.
Deux religieux, fumeurs impénitents, s'avouent en confidence qu'ils trouvent la récitation du Bréviaire - psaumes, hymnes, lectures - bien longue et fastidieuse.
« Si encore on pouvait fumer » , se disent-ils, « ça irait mieux ! »
Ils décident d'aller poser la question à leurs provinciaux respectifs. Quelques jours plus tard, ils se retrouvent; l'un est radieux, l'autre maussade.
« Alors ? » , dit le joyeux, « qu'a dit ton provincial ? »
Il m'a dit : « Vous n'y pensez pas ! C'est non ! »
Et toi ?
« Moi, c'est oui ! »
« Mais dis-moi, qu'as-tu demandé à ton provincial ? »
Je lui ai dit : « Mon Père, puis-je fumer en disant mon bréviaire ? »
Et toi ?
Moi j'ai dit : « Mon Père, pensez-vous qu'on puisse prier, même en fumant ? »
« Bien sûr mon enfant ! » , m'a-t-il répondu.
Le Conseil du Frère Jean-Pierre Lintanf « Prier n'importe où et n'importe quand » :
« C'est vrai, on peut prier n'importe où, n'importe quand. Debout, couché, dans le train ou le métro, en conduisant sa voiture, en épluchant des légumes. Prier, alors, c'est lancer un regard, un cri peut-être, vers cette Présence plus présente à nous-même que nous-même. Prier, c'est une manière de passer devant une Croix, de longer une église, de résonner à la cloche de l'angélus, d'être frappé par la beauté d'un visage rencontré... Nul besoin de long temps, ni de belles phrases. Un petit rien qui donne de l'intensité à l'instant. Comme au sein même d'un travail assidu, on pose ses yeux sur la photo d'un être cher. Au IVe siècle, un père du désert disait : « Il est possible en vivant dans la foule d'être intérieurement solitaire et, en vivant seul, d'être intérieurement envahi par la foule ». On peut, en effet, n'importe où, n'importe comment, jeter vers Dieu, qui n'est pas à distance, la petite flèche de l'attention, de la plainte aussi. D'anciennes traditions spirituelles parlaient « d'oraisons jaculatoires » (du latin « jacula » qui veut dire « javelot », « flèche »). Il faut ainsi garnir son carquois de quelques bonnes flèches : un refrain de chanson, un verset de psaume, un bout d'oraison... C'est à partir du maillage de plus en plus serré des heures et des jours, par ces petits « riens » de prière, que viendra le désir, le besoin même, de temps plus longs, de gestes plus riches, de lieux appropriés. »
Frère Jean-Pierre Lintanf (1925- ….)
Voir également du Frère Jean-Pierre Lintanf :
La Prière du Frère Jean-Pierre Lintanf « Père, c’est de Toi, avec Toi et pour Toi que je tente de balbutier »
L’histoire des « Frères Jésuites fumeurs impénitents » et le Conseil « Prier n'importe où et n'importe quand » du Frère Dominicain Jean-Pierre Lintanf