Prière du Poète Germain Nouveau
Voici la Prière du Cantique à la Reine « Douce Vierge Marie, humble Mère de Dieu » de Germain Nouveau (1851-1920), Poète Varois mystique qui en 1891 lorsqu’il était professeur au lycée Janson de Sailly à Paris fut frappé en plein cours d'une crise de folie mystique et interné à l'hôpital Bicêtre.
La Prière de Germain Nouveau « Douce Vierge Marie, humble Mère de Dieu » :
Douce Vierge Marie, humble Mère de Dieu
Que tout le ciel contemple,
Vous qui fûtes un Lys debout dans l’encens bleu
Sur les marches du temple ;
Épouse agenouillée à qui l’ange parla ;
Ô divine Accouchée,
Que virent les bergers, qu’une voix appela,
Sur la roche penchée;
Qui regardiez dormir, L’abreuvant d’un doux lait,
L’adorant la première,
Un enfant frêle et nu, mais qui, la nuit, semblait
Être fait de lumière ;
Ô morte, qu’enleva dans les plis des rideaux
À la nuit de la tombe
L’essaim des chérubins, qui portent à leur dos
Des ailes de colombe,
Pour Vous placer, au bruit de leurs psaltérions
Dont tressaillent les cordes,
Au Ciel où Vous régnez, les doigts pleins de rayons
Et de miséricordes ;
Vous qu’un peuple sur qui Votre bleu Manteau pend
Doucement importune,
Vous qui foulez avec la tête du serpent
Le croissant de la lune ;
Vous à qui Dieu donna les grands voiles d’azur,
Le cortège des Vierges,
La cathédrale immense au maître-autel obscur
Étoilé par les cierges,
La couronne, le sceptre et les souliers bouffants,
Les cantiques en flammes,
Les baisers envoyés par la main des enfants,
Et les larmes des femmes ;
Vous dont l’image, aux jours gros d’orage et d’erreur,
Luisait sous mes paupières,
Et qui m’avez tendu sur les flots en fureur
L’échelle des prières ;
Vous qui m’avez cherché, portant Votre fanal,
Aux pentes du Parnasse ;
Vous qui m’avez pêché dans les filets du mal
Et mis dans Votre nasse ;
Que n’ai-je, pour le jour où Votre fête aura
Mis les cloches en joie,
La règle du marchand qui pour Vous aunera
Le velours et la soie !
Que n’ai-je les ciseaux sonores du tailleur,
Pour couper Votre robe !
Et que n’ai-je le four qu’allume l’émailleur !
J’émaillerais le globe
Où Votre pied se pose, ainsi qu’un oiseau blanc
Planant sur nos désastres,
Globe d’azur et d’or, frêle univers roulant
Son soleil et ses astres !
Que ne suis-je de ceux dont les rois font grand cas,
Et qui sont des orfèvres !
Je Vous cisèlerais des bijoux délicats,
Moins vermeils que nos lèvres ;
Mais, puisque je ne suis ni l’émailleur plaisant,
Ni le marchand notable,
Ni l’orfèvre fameux, ni le tailleur croisant
Les jambes sur sa table ;
Que je n’ai nul vaisseau sur les grands océans,
Nul trésor dans mon coffre,
J’ai rimé ce bouquet de vertus que céans
De bon cœur je Vous offre.
Je Vous offre humblement ce bouquet que voici :
La couleur en est franche
Et le parfum sincère, et ce bouquet choisi
C’est la chasteté blanche ;
C’est l’humilité bleue et douce, et c’est encor
Fleur du cœur, non du bouge,
La pauvreté si riche et toute jaune d’or
Et la charité rouge.
Ce n’est pas que je croie habiter les sommets
De la science avare,
Et je n’ai pas le fruit de la sagesse, mais
L’amour de ce fruit rare ;
Au surplus, je n’ai pas l’améthyste à mon doigt,
Je ne suis pas du temple,
Et je sais qu’un chrétien pur et simple ne doit
A tous que Son exemple.
Je ne suis pas un Prêtre arrachant au plaisir
Un peuple qu’il relève ;
Je ne suis qu’un rêveur et je n’ai qu’un désir :
Dire ce que je rêve.
Ainsi soit-il.
Germain Nouveau (1851-1920)
Voir également du Poète Germain Nouveau :
La Prière de Germain Nouveau du Cantique à la Reine « Douce Vierge Marie, humble Mère de Dieu »
La Prière de Germain Nouveau « Les Yeux de Jésus-Christ s'ouvrent dans le soleil »