Voici quelques considérations liturgiques pour nous aider à nous attacher à nos Saints Autels sur Lesquels le Saint Sacrifice de la Messe est offert et sur l’invitation à prier que fait le Prêtre lorsqu’il dit « Introibo ad altare Dei » (je m’approcherai de l’Autel de Dieu) au début de la Sainte Messe, données par Monsieur l’Abbé Vincent Grave, Prêtre de la Fraternité Sacerdotale de Saint Pie X (FSSPX) de la Chapelle Saint François d'Assise à Cannes.
L’invitation à prier que fait le Prêtre lorsqu’il dit « Introibo ad altare Dei » de Monsieur l’Abbé Vincent Grave :
Dans son livre sur la messe, saint Léonard de Port Maurice fait cette remarque : pendant le sacrifice de la Croix, le Vendredi Saint, le soleil s’éclipsa ; dans le sacrifice de l’autel, chaque jour, à chaque messe, il faut que ce prodige se renouvelle ; il faut que toutes les lumières de notre raison s’éclipsent et que notre esprit ne soit éclairé que de la foi, pour voir et comprendre les mystères ineffables qui se déroulent à la messe.
C’est la raison pour laquelle nous continuons à vous parler de la messe. Ce mois-ci, nous voudrions surtout évoquer l’autel. Car toute messe commence par les prières au bas de l’autel, par cette invitation à prier que fait le prêtre lorsqu’il dit : Introibo ad altare Dei, je m’approcherai de l’autel de Dieu.
La première chose qu’il faut souligner, c’est que l’autel n’est pas un ornement de l’église. Mais l’église est l’ornement (architectural) de l’autel. Monseigneur Lefebvre, dans La messe de toujours, explique en quoi l’autel est l’élément central de l’église : « Où trouverons-nous Notre Seigneur Jésus Christ ? Faut-il que nous allions en Palestine sur la montagne de la Transfiguration ? Non, nous le trouverons sur nos autels, car désormais Notre-Seigneur est sur nos autels : c’est là que nous le trouverons dans toute sa splendeur ». Ainsi, dès le début de la messe, pensons que tourner notre regard vers l’autel, c’est tourner notre esprit vers Dieu.
L’autel rappelle trois choses : d’abord, le Golgotha. Comme lui, il est (et doit être) surmonté de la croix. Cet autel et cette croix ne doivent faire qu’un, car la croix du Vendredi Saint et son renouvellement non sanglant à chaque messe ne font qu’un. Comme le Golgotha, l’autel porte, après la consécration, la rançon du monde. Comme lui aussi, l’autel est un lieu élevé. Étymologiquement, le mot autel vient du latin altare, altus, qui signifie élevé. Donc, normalement, on accède à un autel par trois degrés, lesquels symbolisent les trois vertus théologales : la foi, par laquelle nous devons croire à l’identité du sacrifice eucharistique et de celui du calvaire ; l’espérance, qui nous fait attendre la grâce en ce monde et le Ciel dans l’autre, par la vertu du corps de Notre Seigneur offert sur l’autel ; la charité, laquelle nous fait aimer ardemment un Dieu qui se livre ainsi par amour pour nous, à chaque messe.
L’autel rappelle aussi d’une certaine manière l’histoire de l’Église, de par sa composition, en bois ou en pierre. L’unique sacrifice de Notre Seigneur s’est opéré sur le bois. Après sa Résurrection, Il se fait connaître aux deux pèlerins d’Emmaüs par la fraction du pain, sur le bois d’une table : Et il arriva, pendant qu’Il était à table avec eux… (Lc, 24, 30). Pendant les trois premiers siècles, les chrétiens furent persécutés. Ils furent obligés de se cacher pour offrir le saint sacrifice de la messe : soit dans des maisons particulières, et ils utilisent alors une simple table ; soit dans les catacombes, et ils offrent la messe sur les tombes des martyrs. C’est l’origine des autels en pierre. Il y a sur chaque autel une petite cavité, d’ailleurs dénommée sépulcre. L’évêque y dépose les reliques de deux martyrs, trois grains d’encens (ils représentent les aromates dont fut embaumé le corps de Notre Seigneur), et un parchemin attestant la consécration. L’évêque ferme ce sépulcre avec un ciment bénit et trace une croix avec le Saint Chrême. Pour que le sacrifice de la messe puisse être célébré sur un autel, celui-ci doit avoir été consacré totalement s’il est fixe ; ou seulement la pierre sacrée s’il s’agit d’un autel portatif.
Qu’il s’agisse de l’un ou de l’autre, tous deux sont marqués de cinq croix, en mémoire des cinq plaies de Notre-Seigneur crucifié.
Enfin et surtout, l’autel rappelle le Christ. Et ce, en premier lieu, par son orientation. L’autel est en effet tourné vers l’Orient, là où le soleil se lève, lequel symbolise le Christ ressuscité se levant de son tombeau. De plus, la croix du Sauveur fut dressée face à l’Ouest ; ainsi, en tournant le visage vers l’Est, le chrétien fait face à l’instrument bénit de sa rédemption. L’Orient est aussi la direction de la Parousie, du retour glorieux du Christ à la fin des temps : Comme l’éclair part de l’Orient et brille jusqu’à l’Occident, ainsi en sera-t-il de l’avènement du Fils de l’homme (Mt 24, 27). L’autel rappelle encore le Christ de par son ornementation. Il est orné de trois nappes, requises pour la célébration de la messe. Elles sont en toile de lin ou de chanvre, car ce sont des produits directs de la terre ; ce sont eux qui doivent porter le corps de Celui qui pour nous fut trois jours dans le sein de la terre.
Ces nappes figurent le saint suaire, acheté par Joseph d’Arimathie. Le texte sacré dit : Ayant donc reçu le corps, Joseph l’enveloppa dans un linceul blanc ; et il le mit dans son sépulcre neuf, qu’il avait fait tailler dans le roc (Mt 27, 59-60).
Et si les nappes sont au nombre de trois, c’est aussi pour parer un inconvénient qui pourrait résulter de la chute du calice : en cas d’accident, le précieux sang est absorbé par le linge, plus facile à purifier que la pierre.
L’autel est également surmonté de cierges, par honneur pour Jésus-Christ ; les hommes allumaient déjà des cierges pour honorer les princes et les magistrats. Les cierges ont également pour fonction de représenter Dieu : n’est-Il pas Père des lumières (Jc 1, 17) ? Et son Fils, la lumière du monde (Jn 8, 12) ? Quant au Saint Esprit, n’illumine-t-Il pas nos âmes ?
On allume deux cierges aux messes basses, six aux messes solennelles et sept si c’est un évêque qui chante la grand’messe, afin d’honorer sa dignité. Les cierges, qui symbolisent encore la virginité du Christ, doivent être de cire d’abeilles, et non de suif.
Les cierges sont encore le symbole de la foi, laquelle est bien une lumière pour les fidèles. La foi peut en effet être comparée à un flambeau que Dieu donne à l’homme, et qui éclaire d’un jour nouveau toute sa vie.
Enfin, les cierges sont un souvenir des catacombes. On peut y penser, quand nous sommes parfois obligés de dire la messe dans des salles de fortune, la « messe de toujours » n’ayant pas droit de cité dans les églises paroissiales.
Et que symbolise, enfin, la lampe de sanctuaire, qui peut aussi être posée sur l’autel ? C’est l’étoile des mages, qui nous indique l’humble demeure du grand Roi… Cette demeure, c’est le tabernacle, l’accessoire le plus important de l’autel. Dès le XII° siècle, la sainte eucharistie fut conservée, dans beaucoup d’églises cathédrales et conventuelles, soit dans une colombe en métal, soit dans une petite boîte d’or ou d’argent suspendue sous le ciborium (c’est un dais ou un baldaquin situé au-dessus de l’autel). A partir du XVI° siècle, les armoires et les suspenses furent remplacées par le tabernacle qui rentra dans la construction de l’autel.
La règle actuelle de l’Église veut que le tabernacle soit intérieurement garni d’une étoffe de soie blanche et enveloppé, à l’extérieur, d’une tenture appelée conopée, qui désigne la présence de Notre-Seigneur à l’attention et à la piété des fidèles.
Que ces quelques considérations nous aident à nous attacher à nos Autels, sur Lesquels le Saint Sacrifice de la Messe est offert. Que nous puissions assister au Mystère de notre Foi avec des âmes bien disposées, qui pourront alors retirer un maximum de Grâces de l’Autel.
Ainsi soit-il.
Abbé Vincent Grave (FSSPX) - « Introibo ad altare Dei », Lou Pescadou n°235 de septembre 2023
Voir également de Monsieur l’abbé Vincent Grave :
- Pour la Fête de Toussaint « Les Saints ont-ils connaissance des prières que nous leur adressons ? » de Monsieur l’abbé Vincent Grave
- La Prière de Monsieur l’abbé Vincent Grave pour l’Épiphanie « Que les Rois Mages intercèdent pour nous et nous aident à manifester Jésus-Christ dans ce monde de plus en plus païen »
- L’injonction du mois de mars de Monsieur l’Abbé Vincent Grave « Allons à Joseph, encore et toujours »
- L’invitation à prier que fait le Prêtre lorsqu’il dit « Introibo ad altare Dei » de Monsieur l’Abbé Vincent Grave