Voici la Méditation du Mardi de Pâques sur la Deuxième Apparition de Notre-Seigneur Ressuscité à ses Apôtres selon l’Évangile de Saint Luc 24, 36-47 « Ô mon Dieu, quelle est l'impression que je dois ressentir en votre divine Présence ? » du Révérend Père Louis-Pierre Pététot (1801-1887), Prêtre Oratorien ordonné en 1824 puis Vicaire et Curé à Paris de Saint-Louis d'Antin et de Saint-Roch et enfin Supérieur Général de l'Oratoire de France de 1852 à 1884.
La Méditation du Mardi de Pâques sur l’Apparition de Notre-Seigneur Ressuscité à ses Apôtres (Luc XXIV, 36-47 ) du R-P Louis Pététot « Ô mon Dieu, quelle est l'impression que je dois ressentir en votre divine Présence ? » :
POINT I : Notre-Seigneur Ressuscité inspire à ses Apôtres tantôt la crainte et tantôt la consolation et la joie. Dans l'Apparition de ce Jour, Il fait tout pour les rassurer, tout pour montrer que le vrai culte qu'Il demande est un culte d'Amour.
POINT II : Ceux qui ont raison d'avoir peur de Dieu, ce sont les révoltés, les esclaves, les ennemis. Grâce à Dieu, je puis croire humblement que je ne suis rien de tout cela et que je le sers par amour, avec une crainte toute filiale. C'est ce que Notre-Seigneur demande de nous.
RÉSOLUTION : Aller à Notre-Seigneur avec une confiance sans bornes et haïr le péché par amour pour Lui.
Nous lisons dans le Saint Évangile que lorsque Notre-Seigneur Ressuscité se montre à ses Apôtres, tantôt ils éprouvent un sentiment de crainte et d'effroi, tantôt un sentiment de consolation et de bonheur. Ô mon Dieu, quelle est l'impression que je dois ressentir en votre divine Présence ? N'est-ce pas l'un et l'autre ? D'une part, en pensant que je suis près de mon Sauveur, de Celui qui a tant fait pour mon âme, qui lui a donné tant de témoignages d'amour, je dois éprouver un grand bonheur ! Mais, d'autre part, quelle crainte doit me saisir, quand je considère la distance si grande qu'il y a entre Vous et moi ! En Vous, ô mon Dieu, je vois votre Gloire, votre Sainteté, l'éclat de toutes vos Perfections. Mais quand je jette les yeux sur moi, je ne vois qu'infirmités. Vous, Vous êtes Glorieux, Ressuscité ; moi, je suis languissant comme un pauvre malade, sans vigueur, sans vie.
Mais surtout je ne puis me présenter devant Vous qu'avec le sentiment de toutes mes fautes. Oui, Seigneur, c'est Vous que j'offense tous les jours, Vous qui êtes si Grand et si Bon pour moi ! Je ne puis le faire que par ingratitude. Ô mon Dieu, ayez pitié de moi, oubliez mes péchés en considération de l'humble aveu que je Vous en fais.
J'entrerai ce matin dans la maison de mon âme, et je veux m'y recueillir dans ce fond où réside le principe même de la Grâce, cette divine Sagesse incréée, dont l'Esprit-Saint nous dit que sa conversation n'a rien de pénible, et sa compagnie rien d'ennuyeux. Au contraire, tout entretien avec Elle est une source de joie et de félicité. Oh ! Combien je désire La trouver en moi ! Oui, désormais c'est avec Elle que je voudrais converser toujours, c'est à Elle que je voudrais confier ma vie. Que cette Sagesse éternelle règle tout en moi, mes pensées, mes sentiments, mes actions. Venez donc, ô Esprit de Dieu, faites-La descendre en moi, non seulement pour guider mon esprit pendant le cours de cette méditation, mais pendant tout le cours de ma vie.
Dans l'Évangile d'aujourd'hui, Notre-Seigneur se montre à ses Apôtres, et lorsqu'ils L'aperçoivent ils sont saisis de frayeur, ils s'imaginent voir un fantôme ; ce Bon Maître est obligé de les rassurer par des Paroles tendres et affectueuses : Ne craignez pas, leur dit-Il, ne craignez pas, c'est moi-même. Voyez, approchez-vous de moi ; un fantôme n'a pas de membres, des pieds, des os, comme vous voyez que j'en ai. Soyez donc tranquilles, ne vous effrayez pas ; est-ce que vous ne me connaissez pas ? Ne suis-je pas votre Maître ? Et puis, avec une bonté toute divine : Avez-vous quelque chose à manger ? leur dit-Il. On Lui offre un peu de poisson et un rayon de miel, et Il en mange en présence des Apôtres, afin de dissiper leurs craintes.
Ô Jésus, à tant de Bonté je reconnais, à n'en pouvoir douter, que Vous venez du Ciel. Oui, Vous êtes bien un Dieu avec nous, le Dieu qui a visité son peuple, un Dieu plein de douceur ; Vous aurez voulu Vous rapprocher de nous, nous inspirer la confiance et l'amour, et Vous avez pris tous les moyens pour bannir la crainte de notre cœur. La peur de Dieu, c'était le sentiment de l'ancien monde, et il a régné bien longtemps. Quoi de plus injurieux envers Lui ? On a dit que c'était la crainte qui avait fait les premiers dieux dans le monde ; oui, sans doute, les premiers faux dieux, les vaines idoles, les divinités mensongères ; mais le Dieu Véritable ce n'est pas la crainte qui L'a fait, ce n'est pas la crainte qui peut L'honorer. Et pourtant n'y-a-t-il pas des créatures qui doivent craindre Dieu, qui ont des raisons légitimes d'avoir peur de Lui ?
Examinons qui sont ceux qui doivent trembler devant Dieu, et qui sont ceux qui doivent avoir confiance. Ah ! Je le conçois sans peine, ceux-là, ô mon Dieu, doivent trembler devant Vous, qui ne Vous aiment pas, qui ne Vous appartiennent pas, qui ne Vous obéissent pas ; ils sont Vos ennemis, ils sont en révolte contre Vous, et comment une créature révoltée n'aurait-elle pas raison de trembler devant un Maître Tout-Puissant ?
Il y a encore les esclaves. Les esclaves, c'est-à-dire ceux qui ne servent Dieu que malgré eux, à contrecœur, par force, qui ne sont fidèles que par crainte des châtiments, qui n'ont rien dans le cœur, pas de dévouement, pas d'affection ; oui, comme devant un ennemi, l'esclave tremble devant son maître.
Or maintenant je veux me faire à moi-même cette question : suis-je l'ennemi de Dieu, ou bien : Est-ce que je Le sers comme un esclave ? Dites-le-moi Vous-même, Seigneur, car je crains de me tromper. Suis-je Votre ennemi ? Me regardez-Vous comme tel ? Suis-je un révolté ? Il me semble, ô mon Dieu, que je n'ai jamais l'intention de Vous déclarer la guerre, de me soulever contre Votre autorité toute-puissante, de braver Vos commandements, de contester les droits de votre Église ? Et pourtant, hélas ! Je le constate tous les jours, je sais bien que je Vous désobéis, que je Vous offense, mais je ne puis dire que c'est par esprit de révolte, d'hostilité, de haine. Aussitôt tombé, je gémis de ma chute. Loin de mettre ma hardiesse à désobéir à un Maitre si Grand et si Bon, je professe qu'une telle désobéissance, si elle était pleinement réfléchie, serait plus qu'une faiblesse : ce serait une impiété. Oh ! Non, je ne suis pas votre ennemi, je voudrais tant Vous aimer !
Mais si je ne suis pas pour Vous un ennemi, peut-être ne suis-je qu'un esclave devant Vous, ô mon Dieu. Il y a quelque chose de triste, d'avilissant dans la condition d'un esclave. Je me consulte dans la sincérité, et il me semble que je ne trouve pas en moi un cœur d'esclave. Non, ce ne sont pas vos Châtiments, votre Puissance, votre Majesté redoutable, ce n'est pas la crainte de vos Rigueurs, de vos Jugements, qui habituellement me conduit ; il me semble qu'il y a au fond de mon cœur des sentiments plus nobles. Il m'est donc permis de le penser : non, je ne suis devant Vous ni un esclave, ni un ennemi, ni un sujet révolté. Ainsi donc ce n'est pas la crainte qui me conduit à Vos pieds, et je puis me compter parmi ceux qui n'ont pas à trembler devant Vous. Quels sont ceux-là ? Ce sont les créatures fidèles, ce sont les enfants qui servent leur Dieu comme leur Père, qui se font un bonheur de Lui être agréables, de mériter Son approbation, qui gémissent de ne pas La mériter davantage.
Ah ! L’enfant ne doit pas avoir peur de son père. Il y a sans doute une crainte filiale avec l'amour, c'est-à-dire un profond respect, un sentiment de vénération religieuse qui fait craindre à l'enfant, comme le plus grand des malheurs, de contrister ce père, de mériter ses reproches ; c'est une crainte qui vient de l'amour. Craindrait-il, en effet, de déplaire à ce Père si Bon, s'il ne L'aimait pas, s'il ne Lui était pas dévoué ?
Voilà ce que Vous voulez, ô mon Dieu, que nous ressentions pour Vous. Vous nous l'avez dit si souvent, Vous nous avez même autorisés à Vous appeler Notre Père, et voilà qu'à l'égard de l'homme Vous venez Vous-même rassurer son cœur pusillanime, et Vous lui dites : N'ayez pas peur, ne craignez donc pas. C'est moi, c'est moi-même, c'est votre Dieu, votre Père, votre Ami. Ne voyez-vous pas que je n'ai jamais voulu vous effrayer, que j'ai pris tous les moyens pour dissiper vos craintes et vous attirer par la confiance ? Quand je suis venu sur la terre, j'ai caché toute ma Gloire, je la cache encore ; il me serait si facile de vous épouvanter, de vous faire mourir par la crainte ! Si du fond du Tabernacle où je repose, je laissais échapper un seul rayon de ma Majesté, que deviendriez-vous ? Vous seriez anéantis, et c'est pour cela que je me cache ; je me dérobe à vos yeux pour demeurer près de vous et vous attirer à moi ; ne craignez donc pas, ayez confiance ; que la Paix soit avec vous, la Paix du cœur, la douce Paix de l'âme, la Paix de la conscience. Voilà les sentiments qui plaisent à Dieu, ceux qu'Il demande de nous, ceux qui Lui sont Glorieux.
Oh ! Mon Dieu, je ne dois donc pas craindre, je ne dois donc pas trembler devant Vous. Les maladies de mon âme ne sont donc pas un motif pour exciter ma frayeur. Quand un enfant est malade, il n'a pas peur de son père ni de sa mère ; au contraire, c'est alors qu'il sent redoubler sa confiance, parce qu'il est sûr de trouver dans le cœur de ses parents plus d'affection, une compassion plus dévouée, des soins plus assidus, plus constants. Oui, je veux le croire, il est doux pour moi d'en être persuadé, tout infirme que je suis, Vous voulez que Votre enfant ait en Vous une Confiance sans bornes. Je m'y abandonne donc entièrement, Seigneur : cela me fait tant de bien ! Je veux Vous aimer ; mais, sans cette Confiance, comment pourrai-je Vous aimer ? Oh ! Seigneur, soyez donc toujours Bon pour moi, et jamais, j'en prends l'engagement, votre Bonté ne me sera un motif pour Vous offenser. C'est ma résolution d'aujourd'hui. La Bonté de Dieu m'enchaîne ; en même temps qu'Elle confond mon esprit dans la reconnaissance, Elle subjugue ma volonté. Elle me dit que de ma part le péché serait une noire ingratitude, une véritable indignité. Un Dieu si Indulgent, si Miséricordieux, si Généreux, trouvera désormais en moi une obéissance toute filiale unie à un dévouement sans mesure.
Ainsi soit-il.
R. Père Louis-Pierre Pététot (1801-1887) - « Méditations sur tous les Evangiles du Carême et de la Semaine de Pâques » : Quarante-Neuvième Méditation du Mardi de Pâques sur la Deuxième Apparition de Notre-Seigneur Ressuscité à ses Apôtres (Luc XXIV, 36-47 ), p. 344-351, Librairie Poussielgue Frères (1889)
Voir la Prière du Mardi de l’Octave de Pâques « Ô Jésus, attirez-moi dans la Plaie qui a été faite à votre Cœur » de l’Abbé Jean-Baptiste La Sausse
Voir également du Très Révérend Père Louis-Pierre Pététot :
- La Prière du R. P. Louis-Pierre Pététot « Jusques à quand, Seigneur, Te serai-je infidèle ? »
- La Prière de M. l'Abbé Louis Pététot « Ô Marie qui fut ici-bas comme nous une enfant »
- La Prière du Révérend Père Pététot « Viens, ô Jésus Rédempteur, réparer Ton ouvrage »
- Les conseils aux malades sur l'usage des Sacrements dans la maladie du R. P. Pététot « Confessez-vous et Communiez Saintement au début et dans le cours d'une maladie sérieuse »
- La Prière d’un Agonisant du R. P. Louis-Pierre Pététot « Seigneur, je sais que je mourrai prochainement »
- Les devoirs de ceux qui entourent le malade du R. P. Pététot « Je n'ose lui parler d'un Prêtre, je crains de l'effrayer »
- La Prière du Père Louis Pététot pour le Mercredi des Cendres « Souviens-toi, ô homme, que tu es poussière et que tu dois retourner en poussière »
- La Prière du Père Louis Pététot pour le Premier Dimanche de Carême « Ô mon Dieu, que ma foi est pauvre ! »
- La Prière du Père Louis Pététot pour le Deuxième Dimanche de Carême « Seigneur, préservez mon âme de toutes souillures »
- La Prière du Père Louis Pététot pour le Troisième Dimanche de Carême « Ô mon Dieu, je prends la résolution au Saint Temps de Carême »
- La Prière du Père Louis Pététot pour le Quatrième Dimanche de Carême « Ô mon Dieu, comme le Ciel me paraît désirable quand je regarde la terre »
- La Prière du Père Louis Pététot pour le Dimanche de la Passion « A ma place que ferait, que dirait, que voudrait Jésus-Christ ? »
- La Prière du Père Louis Pététot pour le Dimanche des Rameaux « Seigneur, n’ai-je pas trop méconnu, négligé, profané le Sacrement de votre Autel ? »
- La Prière du Révérend Père Louis Pététot pour le Jeudi Saint « Ô mon Sauveur, présent dans la Sainte Eucharistie, en ce Jour où l'Église célèbre l'Institution de ce Divin Mystère »
- La Prière du Père Louis Pététot pour le Vendredi Saint « Ô Croix du Calvaire, apprends-moi à détester le mal, à me repentir, et à le chasser de mon cœur »
- La Prière du Père Louis Pététot pour le Dimanche de Pâques « Je me jette à Vos pieds, comme Madeleine, et comme elle je Vous dis : Rabboni »
- La Prière du Père Louis Pététot pour le Lundi de Pâques sur le chemin d'Emmaüs « Ô mon Dieu, je ne Vous vois pas, et cependant je crois en Vous »
- La Méditation du Mardi de Pâques sur l’Apparition de Notre-Seigneur Ressuscité à ses Apôtres (Luc XXIV, 36-47 ) du R-P Louis Pététot « Ô mon Dieu, quelle est l'impression que je dois ressentir en votre divine Présence ? »
- La Méditation du Mercredi de Pâques sur la Troisième Apparition de Notre-Seigneur Ressuscité à ses Apôtres (Jean XXI 1-14) du R-P Louis Pététot « Oui, Seigneur, Vous voulez que je marche enfin seul comme Vos Apôtres »