Voici la Paraphrase du Psaume 37 « Seigneur, souvenez-Vous plutôt de votre Bonté que de l'excès de mes crimes », le troisième des Sept Psaumes de la Pénitence (Ps 6 ; Ps 31 ; Ps 37 ; Ps 50 ; Ps 101 ; Ps 129 ; Ps 142) composés par le Roi David après les deux odieux crimes de l'adultère et de l'homicide qu'il avait commis, donnée par Dom Armand Jean Bouthillier de Rancé (1625-1700), Abbé régulier et réformateur du Monastère de Notre-Dame de la Trappe de l’étroite observance de l’Ordre de Cîteaux à Soligny-la-Trappe dans le diocèse de Seez en Normandie
La Paraphrase du Psaume 37 « Seigneur, souvenez-Vous plutôt de votre Bonté que de l'excès de mes crimes » de l’Abbé de Rancé :
1. Seigneur, souvenez-Vous plutôt de votre Bonté que de l'excès de mes crimes, et ne m'exposez pas à la rigueur de vos vengeances.
2. Je ne murmure point, mon Dieu, contre ces traits redoutables que Vous avez lancés sur ma tête ; je crains votre colère, mais j'adore vos coups, et ne laisse pas de bénir votre main, lorsque je la vois armée de foudres et que j'en sens la pesanteur.
3. La tristesse profonde et la douleur très-amère que j'ai de Vous avoir déplu, n'a pas seulement abattu mon esprit, elle a même accablé mon corps, et désormais le souvenir de mes péchés ne permettra plus à mon âme de goûter aucun repos sur la terre.
4. Je succombe sous le poids de mes iniquités ; je l'avoue, Seigneur, leur nombre est infini, leur pesanteur surpasse la portée de mes forces, et j'éprouve bien maintenant combien un tel fardeau est insupportable.
5. Mais hélas ! Je n'ai senti les plaies que mes ennemis ont faites à mon âme, que lorsqu’elles ont été mortelles, au lieu de les guérir par ma pénitence, je les ai ulcérées par mon orgueil, et ma folie a été si grande que j'ai moins pensé à chercher le véritable remède de mes maux, qu'à les dissimuler.
6. Je connais bien maintenant la grandeur de mon infortune et l'extrémité de ma misère, Vous m'avez humilié jusqu’à l’anéantissement, et les marques de la tristesse, où le repentir de mes fautes m'a plongé, sont visibles sur mon visage, et paraissent dans toutes mes actions.
7. Mais quoique mon âme imprime les traits de la douleur sur mon corps, elle a pourtant encore de la peine à en vaincre les mouvements déréglés, elle le trouve toujours préparé à la révolte, et après avoir soumis mon esprit à vos Lois, je ne puis soumettre ma chair à celle de mon esprit.
8. Plus je considère le juste sujet de mon affliction, plus je sens accroître les sentiments de ma confusion et l'amertume de mes douleurs, et c'est du plus profond de mon cœur que je pousse des soupirs, et que je forme des plaintes et des gémissements.
9. Si quelque chose peut soulager ma peine, c'est que Vous en êtes le témoin, et que la disposition de mon âme ne Vous peut être cachée, Vous en voyez tous les mouvements, Vous savez où tendent tous ses désirs, et il n'en sort pas un soupir dont Vous ne connaissiez la cause.
10. Ce qui fait maintenant tout le trouble de mon cœur, c'est la faiblesse que je sens pour pouvoir résister aux appas du péché, et la funeste expérience que j'ai faite tant de fois du peu de secours que je dois attendre des lumières de ma raison, après avoir étouffé celles de votre Grâce, lorsque je suis attiré par les charmes de la volupté.
11. Depuis que j'ai eu le malheur de tomber en votre disgrâce, Vous m'avez fait éprouver celle de tous les hommes ; et le peu de fidélité que j'ai trouvé en mes plus particuliers amis, est sans doute une juste vengeance dont Vous Vous êtes servi pour punir l'infidélité que j'ai eue envers Vous.
12. Ceux qui m'aimaient véritablement m'ont abandonné, et je ne me suis vu environné que de lâches flatteurs, ou de traîtres infâmes, qui n'ont songé qu’a tendre des pièges pour surprendre ma simplicité.
13. Partout j'ai rencontré ces pièges funestes, tous les discours qu'on m'a tenus n'étaient remplis que de vanité et d'artifice, et la tromperie et la fourbe a toujours été cachée sous les paroles les plus douces et les plus flatteuses.
14. J'ai résolu, Seigneur, de souffrir tous les outrages de mes ennemis, et je veux être sourd à leurs injures, et n'opposer qu'un profond silence à leurs reproches et à leurs calomnies.
15. Et en effet, Vous savez que la mémoire des offenses que j'ai commises contre Vous, m'a rendu insensible à celles qu'on a commises contre moi, car toutes les fois que ma conscience m'a remis devant les yeux mon infidélité envers Vous, je suis demeuré sans parole au milieu de la plus injuste persécution de mes ennemis.
16. Mais, mon Dieu, puisque je me suis tu dans ma souffrance, prenez le soin de ma défense ; je mets toute mon espérance en votre secours, et je tiens ma cause plus assurée entre vos mains que dans les miennes.
17. Faites seulement que les ennemis de mon Salut n'aient point la joie de voir ma perte, et qu'ils ne triomphent point à l'avenir de mes malheurs ; comme ils ont déjà triomphé de mes chûtes et de mes faiblesses.
18. Ce n'est pas, Seigneur, que je ne me reconnaisse digne de tous les châtiments qu'il Vous plaira de m'envoyer, et que je ne sois aussi tout prêt de les recevoir avec la soumission que je dois à vos Saintes Volontés, le souvenir des crimes, par lesquels je mérite les plus rigoureux supplices, étant toujours présent à mon esprit.
19. Je contribuerai à votre vengeance, en me rendant mon accusateur devant les hommes, et me couvrant moi-même de confusion et de honte ; quoique la pensée de mes fautes me soit si amère, je l'entretiendrai toujours dans mon cœur, pour donner quelque satisfaction à votre Justice, et je ne souffrirai pas même qu'elle en parte au comble de ma gloire, et dans le plus grand éclat de mes prospérités.
20. Mais ce qui fait ma plus cruelle peine, c'est de voir, Seigneur, que cette douleur intérieure, qui ne me laisse plus goûter aucune satisfaction dans le monde, ne Vous apaise point, puisque Vous permettez que le nombre de mes ennemis s'accroisse aussi bien que leur puissance, et que ceux qui me haïssent injustement se fortifient tous les jours.
21. J'ai néanmoins cette consolation au milieu de mes malheurs, que ceux qui sont mes ennemis, sont ceux qui favorisent le vice, et qui ne répondent aux bienfaits que par des ingratitudes, et que le principal motif de la haine qu'ils ont pour moi, c'est l'amour que j'ai pour la Vertu.
22. Pourvu que Vous ne m'abandonniez pas, ô mon Dieu, je consens que tout le reste des créatures me quitte et me délaisse ; car je n'ai rien à craindre que la privation de votre Secours et de votre Présence.
23. Ne souffrez pas que je sois abîmé dans les tempêtes qui s'élèvent contre moi, tendez-moi une main secourable, et comme Vous êtes le principe et l'auteur de ma vie, soyez-le aussi de ma conservation et de mon Salut. Ainsi soit-il.
Abbé Armand Jean Bouthillier de Rancé (1625-1700) - « Pensées et réflexions de M. de Rancé, Abbé de la Trappe, paraphrase sur les Sept Psaumes de la Pénitence », Paraphrase du Psaume XXXVII, pages 128-134, chez Vente, 1767
Voir également du Père Abbé de Rancé :
- La Paraphrase du Psaume 6 « Seigneur, dont l'indignation m'est beaucoup plus redoutable que les plus rigoureux effets de votre Justice » de l’Abbé de Rancé
- La Paraphrase du Psaume 31 « Je ne soupire point, Seigneur, après la vaine et trompeuse prospérité des méchants » de l’Abbé de Rancé
- La Paraphrase du Psaume 37 « Seigneur, souvenez-Vous plutôt de votre Bonté que de l'excès de mes crimes » de l’Abbé de Rancé
- La Paraphrase du Psaume 50 « Considérez, Seigneur, la grandeur de mes maux et qu'ils ont besoin de remèdes extraordinaires » de l’Abbé de Rancé
- La Paraphrase du Psaume 101 « Puisque Vous ne pouvez rien accepter que ce qui est Bon et que Vous êtes le principe adorable de tout ce qui porte ce caractère » de l’Abbé de Rancé
- La Paraphrase du Psaume 129 « Dans le comble de mes malheurs et du plus profond abîme de mes misères, je pousse des cris vers Vous, mon Dieu » de l’Abbé de Rancé
- La Paraphrase du Psaume 142 « Seigneur, j'expose devant Vous tous les désirs de mon cœur » de l’Abbé de Rancé
- La Réflexion sur la Vocation de Saint Matthieu « Suis-Moi. Et se levant, il Le suivit » de l’Abbé de Rancé
- La Réflexion pour mieux discerner sa Vocation « Maître, je Vous suivrai partout où Vous irez » de l’Abbé de Rancé
- La Réflexion sur l’Obéissance à la Voix de Dieu « Suis-Moi, et laisse les morts ensevelir leurs morts » de l’Abbé de Rancé
- La Réflexion dans les violentes Tempêtes des tentations « Seigneur, sauvez-nous, nous périssons ! » de l’Abbé de Rancé
- La Réflexion pour contribuer à notre repos et à notre salut « Ayez confiance, Mon fils : vos péchés vous sont remis » de l’Abbé de Rancé
- La Réflexion sur la Parabole du grain de sénevé « Le Royaume des Cieux est semblable à un grain de sénevé » de l’Abbé de Rancé
- La Prière « Ô Seigneur, j’ai le cœur rempli de joie du bonheur qu'il y a à se donner Tout à Vous » de l’Abbé de Rancé
- La Prière « Venez, ô Saint Esprit, Amour du Père et du Fils » de l’Abbé de Rancé
- La Prière « Je prendrai le calice qui opère le Salut et j’invoquerai le Nom du Seigneur » de l’Abbé de Rancé
- La Prière sur la Justice de Dieu « Seigneur, tous ceux qui jugent point en votre Nom sont des usurpateurs » de l’Abbé de Rancé
- La Prière sur la Piété « Seigneur, Vous nous commandez de Prier pour nous accorder ce que nous Vous demandons » de l’Abbé de Rancé
- La Prière sur le Paradis « Vous nous apprenez, Seigneur, qu'il n’y a que deux voies » de l’Abbé de Rancé
- La Prière de Protection « Seigneur, que votre Protection nous est nécessaire » de l’Abbé de Rancé
- La Prière de Confiance « Seigneur, que je reçoive de Votre main la maladie, la santé, la vie et la mort, dans une soumission toute égale » de l’Abbé de Rancé
- La Prière pour bien porter sa Croix « Seigneur, Vous avez imposé à tous les hommes la nécessité de porter la Croix » de l’Abbé de Rancé