Voici le témoignage de Marie, une épouse abandonnée par son mari remarié civilement à une autre, mère de quatre enfants, qui grâce à « Une Rencontre décisive » , va rester fidèle à l'engagement de son Mariage, voir son époux avec d'autres yeux, l'aimer d'une manière toute différente, profonde et paisible.
Le témoignage de fidélité et de pardon à son mari remarié civilement grâce à « Une Rencontre décisive » :
« Élevée dans une famille chrétienne, j'ai eu dans ma jeunesse un passage à vide sur le plan de la foi. La religion me semblait se réduire à un code de morale bourgeoise complètement arbitraire. Cela ne m'a pas empêchée d'être Catéchiste depuis la classe de terminale jusqu'à la naissance de mon quatrième enfant, avec cependant quelques interruptions dues à nos déménagements.
Aînée d'une fratrie de quatre, j'ai beaucoup souffert de la mésentente de mes parents à partir de l'âge de douze ans et du silence complet dans lequel on nous tenait à ce sujet, nous les enfants. Nous pouvions imaginer toutes sortes de choses et surtout, en ce qui me concerne, des solutions pour arranger la situation ... Mon père ne parlait pas beaucoup et ma mère nous tenait à distance sous prétexte de ne pas le fatiguer ou le déranger. Un grave accident et les nombreuses opérations qui suivirent achevèrent de nous le rendre encore plus lointain, jusqu'à ce qu'il quitte le foyer pour vivre de son côté. De plus, il avait dans la même ville une liaison avec une femme mariée. Je n'ai jamais eu de véritables relations avec mon père, sauf dans les tout derniers mois de sa vie, mais ce fut bien trop bref et j'en ai encore aujourd'hui beaucoup de regrets.
À force d'essayer en pensée de « réconcilier» mes parents, je m'étais juré que jamais mon propre Mariage ne craquerait : je saurais bien y faire, moi ! Jean était encore étudiant quand nous nous sommes connus et je commençais tout juste à travailler. Deux ans et demi après, il a trouvé un job à l'étranger et nous nous sommes mariés. L'apprentissage de la langue et sa carrière accaparaient totalement mon mari qui, élevé par un père très autoritaire, vivait ses premiers moments d'autonomie. Je n'étais pas trop consciente de tout cela à ce moment-là, nous ne nous parlions pas beaucoup et j'imaginais que nous étions sur la même longueur d'onde ... À peu près en même temps, j'ai trouvé un travail et attendu notre premier enfant. J'étais au comble du bonheur. Mon idéal se réalisait : me marier avec un homme que j'aime, avoir des enfants, fonder une famille !
Au bout de quatre ans, la nouvelle situation de Jean nous a ramenés en France et j'ai mis au monde notre deuxième fils. J'étais toujours dans l'euphorie. Ensuite, plusieurs changements de situation et des périodes de chômage nous ont conduits à déménager et à nous installer à la campagne. Un troisième fils est venu agrandir la famille. Quand je me souviens de cette période, nous étions heureux et nous avions trouvé - semble-t-il – nos racines, ce qui était très important pour Jean qui avait vécu de nombreux déménagements dans son enfance et sa jeunesse. Jusque-là, nous avions toujours vécu en locations, et nous nous sommes lancés dans l'achat d'une vieille ferme en ruines que nous avons commencé à retaper. Là aussi, nous avons été très heureux de consacrer ensemble notre temps libre à cette tâche : nous construisions notre foyer.
Jean, qui faisait des allers-retours quotidiens de plus de 150 kilomètres pour son travail, commençait à fatiguer. Il décida de ne rentrer à la maison qu'en milieu de semaine et le week-end, puis de s'installer en libéral, mais toujours loin de la maison. Nous nous sommes mis petit à petit à vivre des existences parallèles, lui en ville avec toutes les tentations, et moi à la campagne avec mon travail, les enfants et la maison. La tension devenait de plus en plus grande quand mon mari rentrait. On ne peut pas dire qu'il y avait des disputes mais chacun de nous avait sa vie, ses préoccupations et, surtout, nous ne nous parlions pas. Il m'arrivait de faire des reproches à Jean, mais lui éludait, ne répondait pas et se renfermait sur lui-même. Pendant toutes ces années, il y eut de sa part, comme on dit, des « coups de canif dans le contrat », des aventures que j'ai découvertes sans que jamais il ne me les avoue. Dans ce contexte assez sombre mais dont je me refusais inconsciemment à voir la gravité, une nouvelle naissance s'annonce : une fille ! Une petite sœur pour nos trois garçons ! Pour moi, c'est la joie, pas pour mon mari qui (je ne l'ai su qu'après) est engagé dans une relation extraconjugale.
Depuis quelques années, entraînée par une amie, je fais partie d'un groupe de prière du Renouveau Charismatique qui me conduit un été jusqu'à une session des familles à Paray-le-Monial. J'y suis allée avec nos trois garçons. À partir de ce moment, ma vie n'a plus été la même, il y a eu un avant et un après : j'avais rencontré le Seigneur, tout proche, vivant et agissant au quotidien au milieu de nous !
Cette rencontre et ce bouleversement intriguent mon mari. De temps à autre il me demande de lui en parler. Sans doute l'écart est-il trop grand entre nos vies respectives. Nos relations se tendent jusqu'au jour où il m'annonce qu'il ne m'aime plus, tout en m'assurant n'avoir personne d'autre dans sa vie. C'est le cataclysme, l'explosion de douleur, je n'ose y croire, je veux me persuader que ça va s'arranger, je refuse de voir la réalité et l'étendue du désastre.
Jean rentre de plus en plus rarement à la maison et quand il est là, il est d'une humeur massacrante avec les enfants et avec moi. Centrée sur ma douleur et accablée par l'ampleur des responsabilités familiales qui m'incombent totalement, je lui en veux et lui en fais le reproche. Je suis en colère et je finis par en vouloir aussi au Seigneur : « Je t'ai donné toute ma vie et voilà comment tu me remercies ». Je m'en veux aussi à moi-même : « Comment ai-je pu épouser un tel homme et me faire avoir de la sorte ? » Mon époux finit par m'avouer qu'il a une liaison et un jour de Noël (il y a tout juste vingt-deux ans que nous sommes mariés), son amie lui téléphone. Nous n'entendons pas la conversation mais juste après avoir raccroché, il se lève et devant nos yeux médusés, prend sa veste et nous lance en prenant la porte : « Je vais la rejoindre, elle a le cafard ».
Par la suite, il s'est installé complètement avec elle et venait de temps en temps à la maison. Toujours noyée dans mon chagrin, je ne remarquais pas qu'il sombrait dans la tristesse et les contradictions. Il me faisait envoyer des demandes de divorce par son avocate mais, avant que je les reçoive, il me téléphonait de ne pas en tenir compte. En un mot, il n'arrivait pas à prendre une décision dans un sens ou dans l'autre.
Quelques années auparavant, il m'avait demandé de travailler avec lui, et de tenir la comptabilité et le secrétariat de son activité libérale. Quand il a quitté la maison, je lui ai remis tous les dossiers. Je n'avais plus de travail. De son côté, le moral était très bas et ses affaires ont périclité. J'ai dû retrouver un emploi, ce qui était bien compliqué car nous habitions à la campagne et je devais m'occuper seule des quatre enfants. Heureusement, j'ai trouvé beaucoup d'aide chez mes amis. Mon temps partiel ne me procurait qu'un très petit salaire et Jean ne pouvait plus contribuer à l'entretien et aux études des enfants. Nous avons traversé des mois très difficiles.
À ce moment-là, toujours dans ma colère et ma révolte, j'entends parler d'une session appelée « Un chemin de libération » proposée par un frère carme. Les conditions pour s'inscrire étaient simples : vouloir changer et ne manquer aucune journée. Le parcours se faisait sur trois ans, un samedi entier par mois. À l'époque, j'étais persuadée que ce n'était pas moi qui devais changer ... mais les autres et en particulier mon mari !
Parallèlement, ce frère m'a accompagnée individuellement, et au fil du temps, avec son aide et celle de quelques amis, j'ai pu lâcher prise et me défaire de mon idée personnelle du bonheur. J'ai pu accueillir la Joie « imprenable » offerte par Jésus, Joie qui dépasse de loin toutes les autres. J'ai expérimenté concrètement sa Présence, dans les Sacrements bien sûr, mais surtout dans sa Parole à chaque instant de ma vie. J'ai découvert que c'est Lui qui nous a conduits l'un vers l'autre et que nous restions unis dans son Cœur « jusqu'à ce que la mort nous sépare ». Il me donne son Amour pour que je puisse aimer Jean jusqu'au bout, pas d'un amour sentimental, mais de son propre Amour ! J'ai appris aussi à voir mon époux avec d'autres yeux, j'ai compris beaucoup de ses réactions que je ne comprenais pas auparavant car j'étais complètement centrée sur ma souffrance et ma déception. Je me suis mise à l'aimer d'une manière toute différente, profonde et paisible. On m'a demandé plusieurs fois si mon mari avait conscience que je l'aimais et que je restais fidèle à l'engagement de notre Mariage, alors que lui s'est remarié civilement. Je ne sais pas et cela m'importe peu, à vrai dire. Ce que je sais, c'est que ce chemin est un chemin de paix et cette paix, je sais d'où elle vient, elle rejaillit sur nos enfants qui ont été tellement blessés. Chacun à leur manière, ils avancent sur leur route. Dans les premiers temps de notre séparation, je m'étais sentie très coupable de n'avoir pu leur offrir un foyer stable et aimant, jusqu'au jour où ils m'ont souhaité ma première fête des mères sans leur père : j'ai fondu en larmes et je leur ai demandé pardon, ce qu'ils m'ont accordé spontanément. Ils ont beaucoup souffert également de ne plus voir leur père hors de la présence de sa nouvelle compagne et ont mis un certain temps avant de renouer avec lui, pour lui. Pour lui faire plaisir, m'ont-ils dit, mais comme il leur en coûte ! J'ai entendu d'un frère juif une très belle phrase qui m'a marquée : « Dieu tire d'un mal toujours un plus grand bien ! » Et je peux rajouter : « Oui, mais il faut Le laisser agir...».
Marie - Témoignage du livre « Séparés, Divorcés à cœur ouvert » diffusé à Radio Maria le 19 octobre 2016
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