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Se réconcilier après un divorce avant de mourir

Séparés, Divorcés, Fidèles > Témoignages de Séparé-Divorcé Fidèles

Voici le témoignage de Gabriel, un mari abandonné par sa femme, « Une épouse pour l'éternité », qui après vingt-et-un ans de séparation douloureuse va accueillir chez lui son épouse atteinte d’un cancer et l’accompagner dans la réconciliation conjugale vers le « Pays où l'on ne parle qu'une seule langue : l'Amour » comme l’a dit Saint Jean XXIII avant de mourir.





Le témoignage d’une réconciliation conjugale après un divorce « Une épouse pour l'éternité » :

« Elle a vingt-deux ans, moi trente-cinq quand nous nous fiançons : période de fiançailles durant laquelle nous apprenons à nous connaître, à nous aimer, à vivre dans une chasteté souhaitée par l'un et l'autre, mais difficile à assumer dans la mouvance de mai 68 !

Mariage religieux après une brève préparation en Église. Commence alors la vie commune : après neuf mois de parfaite harmonie couronnée par la naissance d'une petite-fille, débutent quelques difficultés relationnelles que j'attribue à la fatigue, aux changements de rythme provoqués par la naissance, mais je me rassure, l'entente est bonne malgré ces petits accrocs.

Nouvelle naissance deux ans après la première : un garçon.

Mon épouse accaparée par les soins aux enfants et par la tenue de la maison supporte mal sa situation de mère au foyer. Elle souhaite d'avantage de contacts avec l'extérieur, et de fait elle s'évade de plus en plus. Je suis très occupé quant à moi par mon travail de kiné libéral, et ne prête certainement pas assez attention à ses appels répétés. La tension augmente, les disputes sont fréquentes, parfois violentes. Nous avons toutefois le désir commun de ne pas briser notre union et décidons de passer une année au Québec, pensant naïvement que les problèmes resteraient sur le quai que nous quittions. Après un séjour de quelques mois, ma femme rentre précipitamment en Bretagne avec les enfants, du fait de la grave maladie de sa mère. Quand je rentre à mon tour, je trouve la maison transformée : mon épouse s'est aménagé « sa » chambre hors de celle qui fut la « nôtre ». Je comprends douloureusement mais ne sais que faire. Cette situation dure encore quelques mois, ponctuée de crises de plus en plus fréquentes que nous essayons de cacher aux enfants. Et puis un soir, je me retrouve seul avec nos deux petits qui ont alors sept et cinq ans. Les amis se veulent rassurants : « c'est un coup de tête, elle va sûrement revenir » ...

Eh oui, elle reviendra en effet mais ... vingt-et-un ans plus tard !

Pendant cette longue séparation, nous nous sommes retrouvés régulièrement à l'occasion des fêtes de Noël, de Pâques, de nos anniversaires, mais il a fallu du temps, beaucoup de temps avant que soient possibles ces réunions familiales. Il a fallu que s'apaise la colère, cette « mauvaise conseillère » qui me faisait ruminer des désirs de vengeance ; il a fallu que s'atténue cette agressivité qui ne demandait qu'à renaître à la moindre réflexion désobligeante ou interprétée comme telle ; en un mot il a fallu que tout doucement vienne le temps du Pardon.

J'ai la grâce de n'avoir jamais abandonné la prière. Mais allez donc prier le « Notre Père » avec la haine au cœur ! « Pardonne-nous nos offenses comme nous pardonnons à ceux qui nous ont offensés ». Non, je ne pouvais pas pardonner et je me suis « bricolé » une formule de Pater adaptée à mon impuissance : « Pardonne-moi mes offenses comme j'essaie de pardonner à ceux qui m'ont offensé ». À ce moment j'ai eu la grâce de rencontrer la Communion Notre-Dame de l'Alliance, groupement spirituel de chrétiens séparés et divorcés, dont le conseiller spirituel et les membres m'ont engagé et conforté sur la voie difficile du pardon. Je compris peu à peu que le Seigneur, en m'invitant d'abord à ma propre conversion, me mettait en vérité devant mes blessures, mes défenses, mes refus. Me reconnaissant pécheur mais pécheur pardonné, ma reconnaissance à Jésus me poussait à la même attitude de pardon vis-à-vis de ma femme.

Jamais l'envie de « refaire ma vie » ne m'a effleuré. Une fois suffit ! Répétais-je avec un certain cynisme. Ce n'était pas un argument très spirituel, pardonnez-moi, mais j'en étais là au début. Beaucoup plus tard, j'ai approfondi les raisons de la réponse chrétienne que je finis par apporter à cet appel que Jésus m'adressait par la voix de mes sœurs et frères ayant connu la même déchirure. Je n'ai jamais douté que mon épouse l'est pour l'éternité. Jésus l'a mise sur ma route, m'a mis sur la sienne, me l'a confiée, m'a confié à elle, pour une « promotion » mutuelle, une croissance de notre foi.

Vingt-et-un ans ont passé pendant lesquels l'épreuve a affermi ma foi, pendant lesquels jour après jour, heure après heure, avec une inlassable patience, la Vierge Marie m'a conduit sur un chemin de vie et de liberté, si bien que je puis maintenant chanter avec une joyeuse conviction : « Ta Parole, Seigneur, est Vérité et ta Loi délivrance ».

Il vaudrait mieux, paraît-il, traduire le terme de « Loi du Seigneur » par « Chemin de vie ». C'est tout un programme ... auquel, sans aucune restriction, j'essaie de souscrire. Un jour, j'apprends que mon épouse souffre d'un cancer depuis quelques années et a déjà subi plusieurs interventions mais cette fois l'atteinte cérébrale est inopérable. Les troubles du langage et de la vue iront en s'aggravant, la perte de l'autonomie s'accentuera, si bien que l'hôpital m'annonce un soir qu'il faut envisager soit le placement dans un centre, soit le maintien à domicile.

Le lendemain matin, à sa demande angoissée : «Tu ne vas pas me mettre dans un foyer de vieilles bonnes sœurs ? », je réponds sans hésitation : « Non, tu as toujours ta place à la maison ». Merci, Esprit-Saint, de m'avoir inspiré la parole qui convient !

Quelle émotion pour nous deux - vous vous en doutez - de reprendre la vie commune « chez nous », après vingt ans de séparation ! Mais quelle difficulté aussi de faire de ce temps privilégié qui nous est compté une période de nouvelles fiançailles, en réapprenant à nous connaître, à nous manifester concrètement, par les petits gestes du quotidien plus que par de grandes déclarations lyriques, tous les pardons nécessaires, à nous témoigner notre tendresse dans une chasteté nouvelle, difficile à vivre pour moi qui dispense les soins de toilette et de massage ! Nous avons tous les deux de longs échanges sur les sujets, anodins ou graves, qui préoccupent tout couple uni. Elle parle parfois de sa mort, de son désir d'être enterrée près de ses parents ... mais elle dit surtout et redit son bonheur d'être à la maison. Son entourage appréciait son humour, sa gaieté et c'est vrai que nous avons souvent connu des moments de franche rigolade, en compagnie parfois de quelques intimes qui peuvent en témoigner.

Les derniers jours de sa vie terrestre, elle est dans le coma, mais nous continuons à lui faire part de ce qui fait notre quotidien ; et puis elle entre au « pays où l'on ne parle qu'une seule langue, l'amour », comme avait dit saint Jean XXIII avant de mourir ...

Et aujourd'hui ? Pour moi, la vie conjugale continue, sous une autre forme bien sûr, mais je crois mon épouse présente à nos côtés, attentive à chacun de nos gestes, nous apportant assistance et secours : c'est ainsi que je nous vois participer concrètement à ce que l'Église appelle la Communion des Saints ...

En guise de conclusion, je vous livre cette formule que saint Louis fit graver sur son alliance: « Hors cet annel point n'ay d'amour ». Et pour terminer, je pose cette petite devinette : connaissez-vous la définition de l'amour donnée par le dictionnaire ? Écoutez bien : « Amour : disposition à vouloir le bien d'un autre que soi ... et à se dévouer à lui ». Ce n'est ni la Bible ni le catéchisme qui le disent, c'est Le Petit Robert ».


Gabriel - Témoignage du livre « Séparés, Divorcés à cœur ouvert » diffusé à Radio Maria le 21 septembre 2016

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