Voici la Prière d’un agonisant « Seigneur, je sais que je mourrai prochainement », les conseils aux malades sur l'usage des Sacrements dans la maladie et les devoirs de ceux qui entourent le malade du Révérend Père Louis-Pierre Pététot (1801-1887), Prêtre oratorien ordonné en 1824 puis Vicaire et Curé à Paris de Saint-Louis d'Antin et de Saint-Roch et enfin Supérieur Général de l'Oratoire de France de 1852 à 1884.
Les conseils aux malades sur l'usage des Sacrements dans la maladie du R. P. Pététot « Confessez-vous et Communiez saintement au début et dans le cours d'une maladie sérieuse » :
« La maladie, et surtout une de ces maladies qui portent un nom sérieux sans être effrayant, et qui sont quelquefois longues et douloureuses, une telle maladie est un trésor ; oui, un vrai trésor de mérites, une mine d'une richesse incomparable ; il faut l'exploiter et ne rien perdre de biens si précieux, doublement précieux et par ce qu'ils valent et par ce qu'ils coûtent : ce qu'ils valent, c'est le Ciel ; ce qu'ils coûtent, c'est la souffrance. Mais il est une condition essentielle pour arriver à ce but si désirable du salut par nos douleurs, c'est le bon état de la conscience, lequel s'obtient par une bonne Confession. Souffrir est en soi une triste chose ; souffrir sans courage, sans consolations, sans douceur et sans mérite, est bien plus triste encore ; mais mal souffrir, souffrir avec murmure, souffrir en offensant Dieu, c'est ce que je conçois de plus déplorable ; or la Confession et la sainte Communion préservent de ces malheurs en relevant la foi, la confiance, la résignation. Elles sont plus encore : par le calme, la paix qu’Elles apportent à l'âme, Elles répandent du charme jusque sur la souffrance elle-même acceptée et supportée pour Dieu. Chers malades, quand vous serez, je ne dis pas légèrement, je ne dis pas non plus dangereusement, mais sérieusement malades, confessez-vous donc le plus tôt possible ; demandez de vous-même, exigez absolument qu'on fasse venir un Prêtre ; et, s'il est nécessaire, si autour de vous on y fait des difficultés, déclarez formellement, énergiquement, que vous ne consulterez le médecin qu'après avoir vu votre Confesseur. Soyez sûrs que de cette manière vous Le verrez bientôt, et qu'au gré de votre entourage Il n'arrivera jamais assez vite. Voilà mon conseil : que de motifs rendent son utilité incontestable ! Le premier de tous est fondé sur les plus sérieux intérêts de nos âmes. Ne peut-il pas, en effet, arriver qu'une maladie qui d'abord ne paraissait pas grave le devienne tout à coup et amène des conséquences extrêmes : la perte de la connaissance, ou celle de la parole ; des douleurs aiguës qui paralysent tout autre sentiment que celui de la souffrance, ou un abattement tel, qu'il rende impossible toute pensée suivie ? Et la mort, nous saisissant dans cet état, ne peut-elle pas nous trouver, hélas ! bien loin de Dieu, bien peu préparés à soutenir son Jugement redoutable. N'est-il pas sage de prendre ses précautions à tout événement et de se mettre à l'abri d'une surprise ? Il est au conseil que je vous donne d'autres avantages, qui, pour être d'un ordre inférieur, méritent cependant d'être appréciés. N'avez-vous jamais été témoins de la situation cruelle où se trouve une famille auprès d'un de ses membres malade, lorsque le médecin déclare qu'il n'y a plus ni ressource, ni espoir, tandis que le pauvre malade ne soupçonne nullement la gravité de son état ? On veut lui faire recevoir les secours de la religion ; on voudrait cependant lui épargner des émotions fâcheuses, et par conséquent lui cacher la triste vérité. Comment résoudre ce douloureux problème ? À quel prix ne voudrait-on pas échapper à une situation où le cœur, la conscience, la foi, semblent se réunir pour torturer une pauvre famille, et préluder aux déchirements d'une séparation prochaine et inévitable ? Or le moyen simple et infaillible de l'y soustraire, c'est de prendre de vous-même l'initiative, et de demander la visite d'un Prêtre dès que vous êtes sérieusement malades. Par-là vous épargnez à vos familles la plus douloureuse des perplexités pour un moment qui doit arriver tôt ou tard. Enfin, chers malades, par le conseil que je cherche à vous faire accepter, je veux ménager vos propres faiblesses, et l'Église me le permet. Peut-être avez-vous une très-grande crainte de la mort, et n'envisagez-vous pas sans terreur le moment où elle viendra ? Peut-être préfèreriez-vous qu'on la laissât arriver jusqu'à vous sans vous informer de sa présence... En un mot, vous voudriez peut-être mourir sans le savoir, et pourtant sans mettre en péril le salut de votre âme ? Ah ! C’est là une grande faiblesse, et je prie Dieu de vous en guérir. Toutefois cette disposition, tout imparfaite qu'elle est, n'est pas incompatible avec le salut. Confessez-vous et Communiez saintement au début et dans le cours d'une maladie sérieuse ; de cette manière, quoiqu'il arrive, vous êtes prêt, et si la mort s'approche, vous pouvez l'ignorer sans que votre éternité soit compromise. Toutefois, je ne saurais vous le cacher, par ces ménagements pour une regrettable faiblesse, vous vous privez des mérites attachés au plus grand, au plus noble sacrifice que l'homme puisse offrir de lui-même à Dieu, le sacrifice de sa vie. Mais enfin, si vous ne vous sentez pas le courage de pouvoir dire à Dieu la Prière suivante :
La Prière d’un agonisant du R. P. Pététot « Seigneur, je sais que je mourrai prochainement » :
« Seigneur, je sais que je mourrai prochainement, que ma vie touche à son terme et que Vous me la redemandez : prenez-la, Seigneur, je Vous la rends avec une entière résignation et une filiale obéissance », dites au moins : « Seigneur, je ne sais pas si je suis gravement, dangereusement malade ; j'ignore quelles seront les suites de cette maladie, et ce que Vous voulez faire de ma vie : et je confesse à Vos pieds ma faiblesse, ô mon Dieu ! Je n'ai pas le courage de désirer le savoir ! Seulement, quelle que soit votre Volonté sur moi, je l'accepte sans la connaitre, et je m'en remets, pour vivre ou pour mourir, à votre Bonté paternelle ! »
Les devoirs de ceux qui entourent le malade du R. P. Pététot « Je n'ose lui parler d'un Prêtre, je crains de l'effrayer » :
« Procurer les derniers secours de la religion aux malades, ce n'est pas seulement un acte de charité méritoire aux yeux de Dieu, c'est un devoir sacré qu'on n'enfreint pas sans encourir une responsabilité terrible. On se rend coupable d'homicide quand on laisse mourir de faim son semblable ; mais quel nom donner au crime affreux de laisser périr une âme ? C'est le crime de ces médecins qui trompent jusqu'à la fin les malades et ceux qui les entourent ; c'est le crime des parents, des enfants, des amis qui, cédant à des terreurs chimériques, à une faiblesse inexcusable, appellent le Prêtre le plus tard possible, et souvent même lorsque le malade est à toute extrémité. Je ne parle pas ici des tristes familles où l'on attend exprès qu'il soit à l'agonie et sans connaissance, et où l'on veut faire de la religion une vaine formalité de pure convenance, une sacrilège comédie ! Ecartons ces indignités... Je parle de ces familles où il reste encore assez de foi pour regarder les Sacrements comme des choses saintes, pour désirer que les malades Les reçoivent avec les dispositions chrétiennes, et où cependant on ne leur parle de se confesser qu'après que toute chance de guérison est évanouie. Et qu'arrive-t-il alors trop souvent ? On hésite encore, on diffère, des symptômes effrayants se déclarent, on court en hâte chercher un Prêtre ; mais, hélas ! Il vient trop tard : tout est fini. Malheureux ! Ah ! Puissiez-vous ne pas être traité de la sorte à votre heure dernière ! Et daigne le Seigneur, dans sa Miséricorde sans bornes, vous pardonner et ne pas faire peser sur vous la lourde responsabilité d'une âme ! Mais qu'est-ce donc qui retient dans l'accomplissement de cette Mission sacrée ? « Je n'ose lui parler d'un Prêtre, dites-vous, je crains de l'effrayer ». Et quand cela serait ? Aimez-vous mieux exposer son âme à l’éternelle damnation ou à une longue expiation dans le purgatoire ? L’effrayer ! Mais s'il dormait sur le bord d'un abyme ou dans une maison envahie par les flammes, hésiteriez-vous à l'effrayer en le réveillant ? Vous craignez encore de lui faire du mal : ah ! Par ces dangereux ménagements vous lui faites bien plus de mal que son plus cruel ennemi ne saurait jamais lui en faire. Ne dites pas non plus : « Il est si bon, si estimable ; il n'a jamais fait de tort à personne ; Dieu le jugera avec Miséricorde ». Sans doute nous pouvons et nous devons toujours mettre notre confiance dans l'infinie Miséricorde de Dieu, sans doute aussi nous n'avons le droit d'exercer notre sévérité qu’envers nous-mêmes ; mais pourtant quand on est Chrétien, quand on croit à l'Évangile, à ses Lois sacrées, à l'autorité de l'Église, à la nécessité de Lui obéir ; quand on croit qu'un péché mortel, un seul, souille l'âme au point de la rendre indigne du Ciel, comment ne pas trembler pour ces vies où Dieu et son divin Service sont restés si longtemps étrangers ! Et lorsqu'il s'agit d'y revenir, de ranimer la foi éteinte, l’Amour de Dieu endormi, lorsqu'il s'agit enfin de la conversion du cœur, ce grand et difficile ouvrage pour lequel on n'a pas trop le plus souvent de toutes les forces de l'âme, de l'intelligence, de la volonté, que peut-on faire au dernier terme d'une maladie douloureuse, alors que les facultés sont altérées, le corps abattu par la souffrance, et qu'il ne reste peut-être plus qu'un quart d'heure de vie ? Dieu peut accepter encore ce cri suprême du repentir, comme Il accepta celui du larron pénitent ; mais ce sont de ces Miracles de Grâce sur lesquels il serait bien coupable et bien téméraire de compter à l'avance, et qui doivent seulement, en certaines circonstances cruelles, nous préserver du désespoir. Je veux dire comme encouragement à remplir auprès des malades le devoir sacré que j'ai rappelé, qu'on s'exagère beaucoup les inconvénients qu'on y redoute. Dieu, la Sainte Vierge, le saint Ange gardien, quand on Les invoque, sont là pour les atténuer, et je puis déclarer que, pendant tout mon long ministère, je n'ai pas souvenir d'une seule circonstance où les suites en aient été regrettables. L'expérience apprend encore que la plupart des malades accueillent avec une satisfaction sensible la proposition qui leur est faite d'appeler auprès d'eux un Prêtre. Bien souvent ils désirent secrètement sa venue, tout en hésitant à la réclamer. Un pauvre malade sait, ou du moins il pressent que le Prêtre est pour lui 1’ange des divines consolations, qu'il vient remplir auprès de lui le plus doux, le plus bienfaisant de tous les ministères, purifier, consoler son âme, la fortifier par la plus délicieuse de toutes les nourritures, répandre sur ses membres souffrants l'onction qui guérit quelquefois et qui souvent endort les douleurs, et lui apporter enfin, au milieu des plus cruelles angoisses, la Paix et la Douceur de Jésus-Christ. »
Ainsi soit-il.
R. Père Louis-Pierre Pététot (1801-1887) - « Recueil de Prières, de Méditations et de Lectures » tirées des Œuvres des Saints Pères, des Écrivains et Orateurs sacrés par Mme la Comtesse de Flavigny aux éditions Alfred Mame à Tours en 1869, p. 417-426.
Voir également du Très Révérend Père Louis-Pierre Pététot :
- La Prière du R. P. Louis-Pierre Pététot « Jusques à quand, Seigneur, te serai-je infidèle ? »
- La Prière de M. l'Abbé Louis Pététot « Ô Marie qui fut ici-bas comme nous une enfant »
- La Prière du Révérend Père Pététot « Viens, ô Jésus Rédempteur, réparer Ton ouvrage »
- Les conseils aux malades sur l'usage des Sacrements dans la maladie du R. P. Pététot « Confessez-vous et Communiez saintement au début et dans le cours d'une maladie sérieuse »
- La Prière d’un agonisant du R. P. Louis-Pierre Pététot « Seigneur, je sais que je mourrai prochainement »
- Les devoirs de ceux qui entourent le malade du R. P. Pététot « Je n'ose lui parler d'un Prêtre, je crains de l'effrayer »
- La Prière du Père Louis Pététot pour le Premier Dimanche de Carême « Ô mon Dieu, que ma foi est pauvre ! »