Voici la Prière pour mieux se connaître extraite du Sermon du Troisième Dimanche de l'Avent (Dominica Tertia Adventus) sur la connaissance de soi-même « Heureux celui qui a disposé des degrés dans son cœur pour s'avancer de Vertu en Vertu » prêché à la cour de Charles-Quint par Saint Thomas de Villeneuve (1486-1555), Religieux de l'ordre de Saint Augustin, Prieur du couvent de Salamanque puis Provincial qui devint en 1544 Archevêque de Valence.
Tu quis es ? Qui es-tu ? (Jean I, 19)
La Prière du Troisième Dimanche de l'Avent pour mieux se connaître « Heureux celui qui a disposé des degrés dans son cœur pour s'avancer de Vertu en Vertu » de Saint Thomas de Villeneuve :
Ô âme malheureuse pourquoi dans ta vaine curiosité errer sans cesse hors de toi-même ? Pourquoi t'égarer, te répandre à travers le monde et être toujours pour toi comme une étrangère et comme une exilée ? Recueille-toi, reviens à toi, demeure en toi ; ne sois pas comme l'œil qui voit tout et qui ne se voit pas lui-même. A quoi peux-tu mieux employer ton intelligence et ta réflexion qu'à ta propre étude ? Quel plus noble sujet de ta contemplation ? Il n'y a pas d'ignorance plus funeste que l'ignorance de soi- même.
Ô lamentable aveuglement ! L'herbe s'est desséchée, la fleur est tombée ; avec quelle vitesse ! Avec quelle rapidité ! L'homme, dit Job, né de la femme, vivant peu de temps, est rempli de beaucoup de misères. Il vient et tombe comme une fleur (Job XIV, 1). Comme une fleur il se dessèche en un instant.
Ô âme de l'homme, si tu connaissais ta grandeur et ta dignité, la gloire immortelle et les sublimes splendeurs qui t'attendent, comme tu dédaignerais de t'abaisser vers l'amour, vers les convoitises des richesses périssables ! Comme tu aurais horreur de souiller ta beauté dans la boue infâme des voluptés grossières ! Comme tu mépriserais la fumée, le vide des honneurs de ce monde ! Malheur à toi, à cause de l'aveuglement dont t'a frappée le péché du premier homme ! Car si tes yeux n'avaient pas perdu cette Lumière à laquelle tu te voyais dans ta noble réalité, jamais tu ne serais tombée dans une telle misère. Mais tes yeux ont perdu cette Lumière et voilà la source de cette cupidité matérielle qui te fatigue et t'afflige ; de ces affections, de ces désirs qui te courbent vers la terre.
Ô homme, apprenez donc ce que vous êtes ; comprenez la grandeur de votre dignité, afin que votre vie réponde à la noblesse de votre nature. Vous êtes homme, que votre vie soit donc une vie d'homme ; ne descendez pas à la vie de la brute, vivez en homme. Vous êtes une créature raisonnable, vous trouvez dans votre nature la raison comme règle de vos œuvres ; que votre vie soit donc une vie raisonnable ; vivez suivant la règle donnée par la nature.
En vérité, je vous le dis, aucune histoire ne plait au Juste comme sa propre histoire. Quand il se rappelle tous les Bienfaits qu'il a reçus de Dieu, quand il considère les dangers auxquels il a échappé, et les traits de Miséricorde particulière que Dieu a opérés pour lui, quand il se voit libre de son premier aveuglement et de la servitude du péché, quand après être sorti du sein des ténèbres, il se voit inondé de la clarté du jour le plus serein, quelle joie ! Quels transports ! Que d'actions de grâces il rend à son Dieu. Avec quelle effusion, son cœur invite toutes les créatures à rendre à Dieu les louanges que méritent ses Bontés et qu'il ne peut seul Lui rendre dignement ! Comme il s'embrase d'amour pour son Bienfaiteur ! Quelles délices en voyant que Dieu a pour lui tant d'Amour ! Quelle espérance de la Gloire Éternelle vient remplir son âme à la vue de ces témoignages de la Tendresse de son Dieu ! Comme il se hâte de réparer le temps perdu, en servant son Bienfaiteur de toutes ses forces ! Comme il compatit à ceux qu'il voit dans la fatigue de son ancienne maladie ! Et si parfois il pleure lui-même son ancien esclavage, ces larmes ne sont pas amères, elles sont pleines de douceur. Heureux celui qui a disposé des degrés dans son cœur pour s'avancer de Vertu en Vertu, jusqu'à ce qu'il voie dans Sion le Dieu des dieux, au sein de sa Gloire, vers Laquelle nous supplions Jésus, Fils de Marie, de conduire nos pas. Ainsi soit-il.
Saint Thomas de Villeneuve (1486-1555) - Sermon du Troisième Dimanche de l'Avent sur la connaissance de soi-même, pages 171-189, P. Lethielleux (1866)
Voir également de Saint Thomas de Villeneuve :
- La Prière du Premier Dimanche de l'Avent « Seigneur, pénétrez ma chair de Votre crainte, percez mon cœur de Vos flèches, afin que je Vous craigne » de Saint Thomas de Villeneuve
- La Prière du Second Dimanche de l'Avent « Et maintenant, je Vous en conjure, ô Père Saint, faites-nous connaître quelles furent Vos raisons dans l'accomplissement de ce Mystère de l’Incarnation » de Saint Thomas de Villeneuve
- La Prière du Troisième Dimanche de l'Avent pour mieux se connaître « Heureux celui qui a disposé des degrés dans son cœur pour s'avancer de Vertu en Vertu » de Saint Thomas de Villeneuve
- Le Sermon du Quatrième Dimanche de l'Avent sur les Quatre Manières dont Dieu fait entendre sa Voix au pécheur « Les Voix de ses Faveurs, de la Prédication extérieure, de ses Châtiments et de ses Inspirations intérieures » de Saint Thomas de Villeneuve
- La Prière devant le Saint Sacrement « Que je meure, ô mon Dieu, plutôt que de cesser de Vous aimer » de Saint Thomas de Villeneuve
- La Prière pour l’Annonciation « Ô Vierge Bienheureuse, faites sans cesse descendre Dieu dans mon cœur avec sa Divine Grâce » de Saint Thomas de Villeneuve